Le chef d’état-major de l’armée et actuel homme fort de l’Algérie a accusé mardi certains manifestants d’être payés par de « l’argent sale » pour défiler contre la présidentielle que le pouvoir algérien entend organiser le 12 décembre, mais que rejette la contestation.
« Des parties insidieuses (…) utilisent de l’argent sale, versé par des entités inconnues ayant des objectifs malveillants, afin de grossir le nombre des manifestants, en ramenant les citoyens d’autres wilayas » (régions) vers Alger, a déclaré dans un communiqué le général Ahmed Gaïd Salah.
Il n’a pas précisé qui il visait, ni d’où venait cet « argent sale ». Mais le chef d’état-major, parvenu à la tête de l’Algérie post-Bouteflika en s’appuyant sur le mouvement de contestation de ce dernier, a pris les commandes d’une croisade anti-corruption depuis la démission de l’ancien président le 2 avril, sous pression du « Hirak », ce mouvement inédit de contestation du régime qui agite l’Algérie depuis le 22 février.
Selon certains observateurs, ces enquêtes, qui ont conduit en prison de nombreux anciens obligés de Abdelaziz Bouteflika – ministres, hauts fonctionnaires et riches hommes d’affaires – , ont permis une purge au sein du pouvoir, tout en limogeant des hauts responsables pour satisfaire certaines demandes du hirak.
Nouvelle marche des étudiants
Ce même mardi, les étudiants fortement mobilisés ont de nouveau manifesté contre le pouvoir à Alger, malgré un important dispositif policier qui n’a pas, contrairement à la semaine précédente, empêché le cortège de rejoindre le cœur de la capitale. Le cortège s’est dispersé dans le calme en début d’après-midi.
La contestation a repris de la vigueur depuis la fin de l’été et une foule massive s’oppose chaque vendredi à la tenue de la présidentielle du 12 décembre, démentant les affirmations du général Gaïd Salah qui assure que le scrutin est réclamé par le « peuple ».
Ancien soutien indéfectible d’Abdelaziz Bouteflika, le général âgé de 79 ans a de nouveau mis en garde mardi contre ceux qui tentent « d’entraver » la tenue de l’élection, mais également désormais ceux qui voudraient dissuader la population de se rendre aux urnes.
« La loi sera appliquée avec toute la rigueur requise à l’encontre de toute personne qui tente d’entraver ce processus électoral décisif ou d’influencer (…) la conscience du peuple algérien et son empressement à participer massivement » à la présidentielle le 12 décembre, a-t-il averti.
Présenté par le pouvoir comme la seule voie de sortie de crise en Algérie, cette présidentielle est destinée à élire un successeur à Abdelaziz Bouteflika, resté vingt ans au pouvoir.
Mais pour le hirak, le scrutin vise à assurer la survie d’un « système » en place depuis l’indépendance du pays en 1962, dont ils réclament désormais le démantèlement total au profit d’institutions de transition. Des revendications balayées par le haut commandement militaire, aux commandes depuis la démission de l’ancien président.
Source: Jeune Afrique/Mis en Ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée