Les Algériens sont encore mobilisés ce vendredi 20 décembre dans plusieurs villes du pays. Au lendemain de l’investiture du nouveau président Abdelmadjid Tebboune, proclamé vainqueur de la présidentielle il y a une semaine, une partie de la population continue d’exprimer son mécontentement.
Pour le 44e vendredi de suite, une partie des Algériens ont de nouveau marché contre le système en place et le nouveau président qu’ils ne reconnaissent pas. Certains d’entre eux le considèrent comme mal élu, d’autres même comme non élu, puisque la présidentielle a été organisée par un système qu’ils contestent depuis février dernier. Le scrutin a d’ailleurs enregistré un taux de participation historiquement bas, qui a seulement frôlé les 40 %.
Ces manifestations étaient les premières depuis l’investiture, jeudi, d’Abdelmadjid Tebboune, élu dès le premier tour de la présidentielle, avec 58 % des voix, selon les chiffres officiels. Dans son premier discours en tant que président, il a tendu la main aux contestataires, les invitant au dialogue pour « une Algérie nouvelle ». Il a également promis une révision de la Constitution, dans les prochains mois, ou même dans les prochaines semaines.
Le président n’a pas encore constitué son gouvernement, mais il a nommé un Premier ministre par intérim – Sabri Boukadoum, ex-ministre des Affaires étrangères -, après avoir accepté la démission de Noureddine Bedoui, qui était très contesté dans les rangs du Hirak. Le ministre de l’Intérieur, Salah Eddine Dahmoune, a quant à lui été limogé. Il avait créé la polémique en taxant les opposants à la présidentielle du 12 décembre de « traîtres », « mercenaires » et « homosexuels ».
Des annonces accueillies avec prudence par le Hirak
Une partie des opposants au scrutin attend de voir comment les paroles du président se concrétiseront. Mais pour d’autres, et notamment pour les manifestants présents aux manifestations ce vendredi, ce discours ne change rien. Pas plus que son élection. Pour eux, le scrutin présidentiel est un « coup de force électoral » dont il ne faut rien attendre.
En témoignent ces pancartes, visibles ce vendredi dans les rangs de la manifestation à Alger, sur lesquelles étaient inscrites des phrases comme : « Pas de dialogue avec les fraudeurs », ou encore « système dégage ».
Les manifestants ont également continué à scander des phrases telles que « État civil et non militaire ». Pour eux, le nouveau président ne constitue qu’une façade civile, alors que le véritable pouvoir reste entre les mains des hauts gradés de l’armée, et en particulier du chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah.
En attente de gestes forts
Dans ce contexte difficile, plusieurs chercheurs estiment que la balle est dans le camp du président, puisque les contestataires algériens souhaitent des gestes forts de la part du chef de l’État.
Il pourrait s’agir, par exemple, d’une éventuelle libération des personnes arrêtées en lien avec le mouvement de contestation. Toutefois, le jour même de l’investiture d’Abdelmadjid Tebboune, un jeune militant du Hirak a été condamné à 18 mois de prison ferme, pour « atteinte à l’intérêt national ».
Concernant l’offre de dialogue, plusieurs observateurs indiquent qu’il faut attendre de savoir quels seront les participants, et quelles questions seront abordées. La principale revendication du Hirak reste l’instauration d’un État civil, et non militaire. Elle sera sans doute difficile à satisfaire, si l’on considère que le pouvoir réel est effectivement détenu par le haut commandement de l’armée.
Mais qu’ils soient dans les rangs du pouvoir ou de l’opposition, une grande partie des Algériens sont d’accord pour dire que des réformes doivent être menées rapidement, dans de nombreux secteurs, et notamment pour redresser une économie à bout de souffle.
Source: RFI Afrqiue/Mis en ligne: Lhi-tshiess Makaya-exaucée