L’accès aux données s’avère crucial dans la lutte contre le virus, tout comme le fait de savoir si celles-ci bénéficient d’une protection efficace, selon James Claude, PDG de Global Voice Group, qui fournit des solutions informatiques aux gouvernements et autorités de régulation.
Favorisée par les mouvements de population, la propagation mondiale en quelques semaines du Covid-19 a obligé les pouvoirs publics à imposer des règles strictes de distanciation sociale et de confinement. Dans ce contexte, l’accès aux données de mobilités’avère essentiel pour permettre de modéliser la diffusion du virus. De même que les données de voyages contribuent à expliquer sa propagation, les données de géolocalisation permettent de fournir aux gouvernements des informations fiables à l’appui de leurs efforts pour endiguer la pandémie.
LA QUESTION ESSENTIELLE EST DE SAVOIR DANS QUELLE MESURE LES DONNÉES DES ABONNÉS SONT PROTÉGÉES
L’essor de la téléphonie mobile en Afrique au cours des dix dernières années et le renforcement des infrastructures qui en découle placent les opérateurs en première ligne pour ce suivi, grâce à la collecte de données de géolocalisation. De quoi permettre la collecte de grandes quantités d’informations déterminantes pour comprendre la façon dont le virus se propage et observer si les règles de confinement sont respectées.
Les angles morts de la géolocalisation
Ce besoin de données de mobilité à des fins de santé publique suscite naturellement certaines interrogations, à commencer par la garantie de leur précision et de leur fiabilité. Mais la question essentielle est probablement de savoir dans quelle mesure les données des abonnés sont protégées. Les géants du web qui collectent des données pour aider à contrôler la propagation du Covid sont limités dans leur démarche par la nécessité que la fonction géolocalisation soit activée, ce qui signifie qu’elles ne peuvent être recueillies en continu.
Par ailleurs, n’étant pas basés dans les pays où ils opèrent, les géants du web ne sont tenus de se conformer qu’à la législation de leur propre pays en matière de confidentialité des données. Enfin, les données collectées dans leur Cloud sont très probablement stockées hors du pays concerné, ce qui complique la donne. S’ils assurent ne publier que des données agrégées, ils ne doivent pas faire l’impasse sur d’autres mesures de sécurité telles que la limitation de l’accès aux données et la justification de leurs finalités.
Promouvoir la transparence
La crise sanitaire a révélé la nécessité d’analyser les données de mobilité pour suivre les mouvements de population à partir de sources exhaustives. Avec comme objectif de garantir la conformité réglementaire, l’efficacité du processus décisionnel et sa transparence. Les données recueillies doivent être entièrement agrégées et anonymisées, stockées dans les pays concernés, sous le contrôle des gouvernements respectifs, sans risque qu’elles soient vendues à d’autres entités et organisations. Aux décideurs de choisir les solutions conformes à leurs propres lois en matière de confidentialité afin d’assurer aux données des utilisateurs un environnement hautement sécurisé.
Selon les dernières données du Johns Hopkins University avec 8 070 cas confirmés de Covid-19 au 1er juin, le Ghana figure en tête des pays les plus contaminés en Afrique de l’Ouest en en Afrique centrale. Un constat qui a mené le gouvernement et les autorités sanitaires à reconnaître la nécessité de disposer de données de mobilité précises et exploitables pour évaluer notamment l’exposition des citoyens au virus et prendre les bonnes décisions au bon moment afin de limiter sa propagation.
Système automatisé au Ghana
En 2018, le Bureau des statistiques du Ghana a lancé une initiative en partenariat avec un opérateur de téléphonie mobile national pour analyser les données de mobilité dans son réseau. Cela a permis de recueillir des informations précieuses mais partielles, l’ensemble de la population n’étant pas couvert. La plateforme numérique de suivi, qui collecte déjà des informations à des fins de garantie des revenus issus des échanges téléphoniques, a été adaptée pour inclure la géolocalisation des appels. De quoi permettre d’agréger les contenus de tous les opérateurs, quand le processus d’assurance qualité intégré garantit la fiabilité et la représentativité de l’ensemble des donnés.
L’OBJECTIF EST DE CONSTRUIRE DES SYSTÈMES AUTOMATISÉS QUI FOURNISSENT DES INFORMATIONS SUR LES MOUVEMENTS DE POPULATIONS
L’objectif est de construire des systèmes automatisés qui fournissent des informations sur les mouvements de populations, proposent des tableaux de bord et des index décrivant la situation en temps réel. Cette expérience met en lumière l’importance que toutes les données sur la mobilité soient corrélées pour restituer la situation sur le terrain. C’est ce qui a aussi permis d’évaluer si le confinement est respecté.
Si, dans un monde confiné, les avantages des technologies s’appuyant sur les données ont été confirmés, il est aussi rapidement apparu qu’elles peuvent jouer un rôle majeur dans la lutte contre le virus en fournissant les données nécessaires pour surveiller et modéliser sa propagation. Cela requiert néanmoins d’être très attentif aux problèmes de confidentialité des données soulevés par le recours à ces technologies. Une utilisation judicieuse, responsable et transparente des données contribuerait à améliorer notre connaissance de la façon dont le virus circule, faciliterait l’accès aux soins de santé et renforcerait la confiance des populations dans les technologies utilisées pour collecter les données.
Source: Jeune Afrique/Mis en : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée