Le gouvernement tunisien a besoin de neuf milliards de dinars (2,8 milliards d’euros) pour boucler le Budget 2020 ; et de près de 20 milliards de dinars (6 milliards d’euros) pour asseoir celui de 2021.
La Tunisie traversait déjà une crise économique, aggravée par la pandémie de Covid-19. Le pire, c’est que la notation souveraine de la Tunisie est au plus bas et risque de payer très cher ses sorties sur le marché financier international.
Le gouvernement technocrate de Mechichi est venu à un moment difficile pour la Tunisie, au niveau économique et financier. La loi de finances complémentaires 2020 nécessite déjà neuf milliards de dinars (2,8 milliards d’euros), malgré les deux milliards d’euros obtenus en juin et juillet sous forme d’aides et de prêts pour faire face à la Covid-19.
La situation est d’autant plus difficile que les ratios économiques clignotent au rouge. La Tunisie bénéficie peu de ses richesses naturelles, avec une production de phosphate qui n’a jamais dépassé, depuis 2011, la moitié des huit millions de tonnes de 2010, entraînant une quasi-faillite de la Compagnie des phosphates de Gafsa, qui emploie un effectif deux fois et demi supérieur à celui de 2010.
L’activité pétrolière est, elle aussi, au creux de la vague, après plus de trois mois de sit-in (de juillet à novembre), privant la Tunisie de recettes supérieures à 300 millions de dinars (100 millions d’euros). Tout cela a fait que le Produit intérieur brut (PIB) terminerait l’année autour de -7, du jamais-vu depuis l’instauration d’un Budget en Tunisie.
Le comble, c’est que la Banque centrale de Tunisie (BCT) n’est pas d’accord avec la politique économique du gouvernement. Appelé à parler de la situation économique et monétaire et des solutions envisagées devant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le gouverneur de la BCT, Marouane Abbassi, a ouvertement critiqué la politique économique des gouvernements successifs. «Ce n’est pas normal que le gouvernement s’endette pour payer les salaires.
Les prêts servent pour investir et créer des richesses. Pareille attitude n’aide pas à la reprise économique», a dit Abbassi, refusant net de faire tourner la planche à billets afin de financer la loi de finances complémentaire. Lequel projet a été revu à la baisse par le gouvernement. Mais la BCT maintient ses réserves. «Notre rôle, c’est de maintenir la monnaie et le pouvoir d’achat du citoyen», insiste Abbassi. Toutefois, face à la pression des différents pouvoirs, la BCT a exigé une note écrite de l’Assemblée pour justifier pareils agissements.Advertisements
10e Anniversaire
Il y a pourtant un symbole qui pointe à l’horizon. La Tunisie fêtera dans quelques semaines le 10e anniversaire de sa révolution (17 décembre-14 janvier). Le Budget de cette année symbole est l’un des plus difficiles à préparer. Il manquerait 20 milliards de dinars (six milliards d’euros) pour le clôturer.
Les projections les plus optimistes parlent de 01% de croissance du PIB par rapport à 2019. Les gouvernants tunisiens n’ont plus la cote auprès des institutions internationales et la Tunisie risque d’être classée comme mauvais payeur, même si, jusque-là, elle n’a jamais failli à ses obligations.
Par ailleurs, l’impatience populaire est à son comble à la veille du 10e anniversaire de la révolution. Les citoyens semblent perdre, de plus en plus, l’espoir en un éventuel changement, surtout avec l’augmentation du chômage, né de la pandémie.
Le taux de chômage est passé de 15 à 19% de la main-d’œuvre active. En plus, les zones pauvres n’ont pas connu l’essor escompté. «Pire, c’est la corruption qui s’est davantage implantée dans les circuits économiques et administratifs», regrette Salem Abdelmagid, ancien secrétaire général adjoint de la centrale syndicale UGTT.
Et le pire, ajoute ce syndicaliste, «les urnes risquent de mettre devant le Parti destourien libre, contre lequel les Tunisiens se sont révoltés en 2011, et les islamistes d’Ennahdha, principaux responsables des échecs de l’après-Ben Ali», si l’on en croit les sondages. La Tunisie fêtera le 10e anniversaire de sa révolution dans une situation socioéconomique très difficile.
Source: El watan/Mis en ligne:Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée