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DIPLOMATIE
CPI : Karim Khan succède à Fatou Bensouda au poste de procureur
Le Britannique a été élu procureur pour un mandat de neuf ans, vendredi 12 février, lors d’un vote à bulletin secret. Faute d’avoir atteint un consensus, les États-parties ont dû, pour la première fois, en passer par un vote.
Après des mois de consultations, c’est finalement à l’issue d’un vote que Karim Khan a été choisi pour succéder à la Gambienne Fatou Bensouda au poste de procureur de la Cour pénale internationale (CPI). Les 123 pays membres l’ont désigné vendredi au cours de la session annuelle de l’Assemblée des États-parties qui s’est tenue à New York.
Le troisième procureur de la Cour de La Haye succèdera en juin à Fatou Bensouda, qui avait été nommée par consensus en 2011, comme cela avait été le cas pour son prédécesseur, l’Argentin Luis Moreno Ocampo.
L’élection s’est tenue en deux tours, le Britannique étant passé à trois voix de la majorité – fixée à 62 voix – lors du premier tour. Il remporte l’élection devant l’Irlandais Fergal Gaynor (42 voix), l’Espagnol Carlos Castresana Fernandez (5 voix) et l’Italien Francesco Lo Voi (3 voix).
Cet avocat spécialiste des droits humains âgé de 50 ans a récemment dirigé une enquête spéciale de l’ONU sur les crimes du groupe État islamique. Il a également exercé dans plusieurs tribunaux internationaux et spéciaux pour le Rwanda, la Sierra Leone, le Liban, le Cambodge et l’ex-Yougoslavie. Il a aussi été le conseil de l’ex-président libérien Charles Taylor, condamné en 2012 à 50 ans de prison pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Karim Khan a aussi défendu, devant la CPI, les intérêts de l’ancien vice-président du Kenya, William Ruto, du Congolais Jean-Pierre Bemba et de Saïf al-Islam Kadhafi, le fils de l’ancien dirigeant libyen.
Échec du consensus
Initialement prévue du 7 au 17 décembre, la session de l’Assemblée des États-parties avait été divisée en deux parties distinctes, renvoyant l’élection du procureur au 12 février. La phase de nomination du procureur a été repoussée pas moins de neuf fois, les consultations avec les États-parties ne permettant pas de déboucher sur un consensus.
Quatre candidats avaient été désignés par un comité d’experts. Une nouveauté, censée garantir plus de transparence dans un processus généralement marqué par des tractations intenses entre les États. Des mesures inédites avaient été mises en place par la Cour pour éviter les campagnes privées, comme l’audition filmée des candidats ou la publication de rapports détaillés sur les choix du comité d’experts chargé de la sélection initiale.
Mais ces candidats présélectionnés, parmi lesquels figuraient deux Africains, avaient été jugés trop inexpérimentés par plusieurs États membres. La liste avait alors été élargie à de nouveaux concurrents, et c’est à ce stade que le nom de Karim Khan était apparu.
Les consultations conduites à New York avaient toutefois échoué à faire émerger un candidat consensuel. Jusqu’au bout, la compétition se sera jouée entre Karim Khan et Fergal Gaynor, issu de la première sélection.
Pressions
L’élection de Karim Khan intervient à un moment où la CPI a fait l’objet d’une pression très forte de la part des États-Unis – pression qui pourrait toutefois s’atténuer avec l’arrivée au pouvoir de Joe Biden.
Parmi les premiers dossiers sur lesquels Karim Khan devra se pencher figurent l’enquête sur les crimes de guerre en Afghanistan, qui pourrait impliquer Washington, et celle – controversée – sur les Territoires palestiniens.
L’actuelle procureure, Fatou Bensouda, dont le mandat a été marqué par une forte opposition africaine à la Cour, restera en poste jusqu’au 16 juin. En octobre dernier, elle assurait toutefois à Jeune Afrique que la confiance avec le continent avait été restaurée.
Elle avait également prodigué quelques conseils à son successeur : « Quelle que soit la personne qui me remplacera, je lui conseillerais d’être extrêmement prudente, parce qu’à ce poste, quoi que vous fassiez, on vous reprochera de le faire pour des raisons politiques, avait-elle averti. Il est primordial de se tenir à l’écart de toute considération politique et de n’être guidé que par le droit. La crédibilité de la Cour en dépend. »
Source : Jeune Afrique/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée