Le tribunal constitutionnel vient d’annuler l’élection d’Adalberto Costa Júnior à la tête du principal parti d’opposition angolais. Ses membres dénoncent une décision politique.
C’est l’ascenseur émotionnel au sein de l’Unita, le principal parti d’opposition angolais. Mardi 5 octobre, le parti, dirigé par Adalberto Costa Júnior depuis fin 2019, a connu une grande joie en lançant un « Front patriotique uni » : une alliance de l’Unita et de deux autres partis d’opposition en vue des prochaines élections générales de 2022.
Cette initiative d’union, plusieurs fois tentée par le passé sans succès, est présentée comme le seul moyen de bousculer le MPLA du président João Lourenço, parti au pouvoir en Angola depuis l’indépendance du pays en 1975. D’où le visage tout sourire d’un Costa Júnior appelant les Angolais à rejoindre sa « plateforme d’espoir ».
Sauf que, ce même 5 octobre, le tribunal constitutionnel angolais s’est réuni et a pris une décision, rendue officiellement publique deux jours plus tard, en forme de douche froide pour l’Unita : il annulait, en raison d’irrégularités de procédure, le congrès de fin 2019 ayant porté Adalberto Costa Júnior à la tête de l’Unita.
Zones d’ombre
Selon la décision d’une cinquantaine de pages, plusieurs règles prévues par la loi sur les partis politiques et le règlement du parti lui-même n’ont pas été respectées.
Principal problème, Adalberto Costa Júnior, qui a renoncé à sa nationalité portugaise pour se présenter – le candidat ne doit avoir qu’une seule nationalité – , ne l’a pas fait dans le délai imparti. D’autres zones d’ombre sont pointés, comme la prolongation de certains délais durant le processus électoral et la composition erronée de certaines commissions.
IL S’AGIT D’UNE DÉCISION PLUS POLITIQUE QUE JURIDIQUE ET D’UN COUP DUR PORTÉ À LA DÉMOCRATIE ANGOLAISE
« Il est étonnant de voir que les documents relatifs au congrès, qui ont été envoyés juste après sa tenue au tribunal constitutionnel comme le prévoit la loi, n’avaient à l’époque appelé aucune réaction », s’indigne Alcidès Sakala, député et membre historique du parti qui doit se réunir pour statuer sur la réponse à apporter.
Impopularité du MPLA
La plainte à l’origine du dossier a été déposée par dix militants de l’Unita, selon la décision du tribunal, présidé depuis août par Laurinda Cardoso, ancienne secrétaire d’État à l’Administration du territoire et membre du MPLA.
« Il s’agit d’une décision plus politique que juridique et d’un coup dur porté à la démocratie angolaise », reprend Alcidès Sakala, dont le parti dénonçait déjà, sous la présidence de José Eduardo dos Santos, l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques – une accusation toujours rejetée par le MPLA.
L’affaire est hautement sensible à quelques mois du scrutin de l’an prochain. Elle intervient alors que l’Unita a le vent en poupe, portée par un mécontentement croissant au sein de la population et l’émergence de vives critiques contre le parti au pouvoir.
Ce dernier, divisé par la lutte contre la corruption menée par le président Lourenço et fragilisé par un contexte de crise économique, doit trouver les ressorts pour défendre son bilan et s’assurer une victoire électorale.
Source: Jeune Afrique/ Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée