Sept ans après la création de ce tribunal, trois chefs de guerre sont poursuivis pour crimes de guerre devant des magistrats nationaux et internationaux.
Louée par certains comme un modèle de justice à exporter dans d’autres pays, la CPS est critiquée par d’autres qui doutent de son efficacité tant elle a tardé à ouvrir son premier procès, pour trois criminels de guerre présumés sans envergure.
Dans le box des accusés, trois suspects sont attendus : Issa Sallet Adoum alias Bozizé, Yaouba Ousman et Mahamat Tahir. Tous des anciens membres du groupe rebelle « 3R » (Retour, Réclamation et Réhabilitation). Ils sont poursuivis pour des crimes qui auraient été commis en 2019, à Lemouna et Koundjili dans la province de Paoua dans le nord-ouest du pays.
Pour les avocats des victimes, le début de ce procès devant la Cour Pénale Spéciale est une bonne nouvelle. « Cette audience est capitale parce que beaucoup de victimes, des orphelins des actes qui ont été commis par les hommes des 3R à Lemouna et Koundjili, c’est le moment où jamais » explique Me André Olivier Manguereka. « Les victimes vont exprimer leur préoccupation devant la Cour Pénale Spéciale. J’ai déposé une plainte le 11 mars 2020, au nom de ces victimes et nous avons recueilli assez d’éléments pour étayer nos arguments pour défendre les victimes ».
Signal fort
Le procès s’ouvre au moment où plusieurs civils sont tués et des maisons incendiées à Aïngbando, dans le nord du pays. Des actes attribués aux forces centrafricaines et leurs alliés russes. Pour la Cour pénale spéciale, ce procès est un signal fort pour ceux qui se croient intouchables.
« Ce procès constitue une mise en garde pour tous ceux qui pensent qu’ils pourront violer sans gêne les droits humains et circuler librement sur le territoire national. La justice quelle que soit sa forme ou sa lenteur, atteindra toujours ses objectifs à savoir, garantir les droits constitutionnellement établis de tout Centrafricain et étranger vivant sur le territoire national. C’est ce rôle qui relève de la justice en tant que piédestal de l’Etat de droit dans tout Etat », estime Jean-Bruno Malaka, le porte-parole de la Cour pénale spéciale.
Petite sœur de la CPI
La Cour pénale internationale, la juridiction sœur de la Cour pénale spéciale, se réjouit de l’ouverture de ce procès. Esti Tambay, conseillère juridique à la CPI affirme que « les accusés auront droit à la pleine protection de leurs droits y compris la présomption d’innocence. Le premier procès sera un test crucial du système de la Cour Pénale Spéciale. Il sera important pour le tribunal d’évaluer le déroulement de ce premier procès afin d’en tirer des leçons qui pourront être utilisées pour améliorer ses pratiques pour les procès futurs. Finalement il est important de savoir que la CPS mène des enquêtes en tandem avec la Cour Pénale Internationale. La CPI est une cour permanente de dernier recours ».
L’audience qui s’ouvre ce mardi comporte aussi des risques à cause des remous au sein des avocats, constitués et commis d’office. Certains boudent en effet l’offre de la CPS qui serait au deçà de leurs attentes.
Source: Deutsche Welle Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée