Au terme d’une négociation avec les banques commerciales, les ministres des Finances et les organisations patronales de la zone monétaire, la BEAC a accepté de satisfaire les demandes de sortie en devises des opérateurs économiques. Mais a aussi posé ses conditions.
Le 4 juillet, la Banque des États d’Afrique centrale (BEAC), les ministres des Finances et de l’Économie, les responsables de la Cemac, les représentants des associations de banques et les organisations patronales des pays de la communauté monétaire d’Afrique centrale (Cameroun, Gabon, Congo, République centrafricaine, Guinée équatoriale et Tchad) ont conclu un accord, baptisé « compromis de Douala », à l’issue de la réunion de sensibilisation sur la nouvelle réglementation de changes de la zone.
Par ce texte, la banque centrale s’engage à donner une suite favorable aux demandes de sortie des devises des opérateurs économiques qui lui sont adressées, sans tenir compte des devises que les banques détiennent à l’extérieur de la zone Cemac. En contrepartie, la banque centrale régionale sanctionnera les banques qui détiennent des réserves de changes injustifiées – avec une amende correspondant à 5 % du montant concerné.
Accusée de bloquer l’économie, la BEAC renvoie la responsabilité aux banques
Il faut dire que la position de la BEAC devenait intenable, au regard de l’ampleur de la polémique sur une pénurie des devises. Le 1er juillet, Célestin Tawamba, président du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), s’était ainsi fendu d’un communiqué pour relater les « vives préoccupations » des patrons camerounais.
« Au 15 juin, les demandes de transfert bloquées totalisaient plusieurs dizaines de milliards de F CFA. Les délais d’exécution ne sont plus respectés, ils varient de plusieurs semaines à plusieurs mois. Plus longues, les procédures de transfert sont aussi plus complexes, et les commissions de transfert et d’achat des devises, ainsi que divers frais bancaires sont en hausse », déplorait son communiqué qui évoquait des « conséquences désastreuses pour les entreprises et pour l’économie en général ».
Une sortie jugée « inopportune » par Abbas Mahamat Tolli. Pour le gouverneur de la Beac, ce sont les banques qui ne jouent pas toujours le jeu. « 60% des rejets s’expliquent par le fait que ces dernières disposent déjà d’avoirs en devises suffisants. Au lieu de les utiliser pour répondre aux besoins de leurs clients, elles préfèrent se tourner vers la banque centrale. Et c’est elle qu’elles accusent auprès de la clientèle lorsqu’elles n’obtiennent pas satisfaction », s’offusque un cadre de la Beac sous anonymat.
Moratoire refusé
La BEAC met également en cause les autorisations d’ouverture de comptes en devises accordées sans son accord préalable aux résidents (États, individus et entreprises) par les ministres de Finances. Fin février, 2 188 comptes, représentant 92,3 milliards de F CFA (140 millions d’euros) correspondaient à cette catégorie, entravant la centralisation des réserves par la banque centrale.
Enfin, la banque centrale pointe des pratiques d’importation de devises à son insu par les établissements bancaires, pour un montant qui dépasserait les 80 milliards de francs CFA pour les seuls mois d’avril et mai. Autant d’anomalies qu’est censée corriger la nouvelle réglementation de changes adoptée en décembre et en vigueur depuis mars, qui lui redonne la maîtrise de ces actions.
Le nouveau texte impose désormais aux banques un délai de cinq jours – et non plus de trente jours – pour transférer 70 % des devises en leur possession à la banque centrale. Lors de la rencontre de Douala, la BEAC n’a pas accédé à la demande des banques commerciales et des opérateurs économiques, qui réclamaient un moratoire pour se familiariser avec ce nouveau dispositif.
Source: Jeune Afrique/Mis en ligne :Lhi-tshiess Makaya-exaucée