AFP / Ebrahim HAMID

Après quasiment huit mois de mobilisation au Soudan, les militaires et les chefs de file de la contestation ont signé, samedi, un accord historique en vue d’une transition dirigée par les civils.

Les militaires au pouvoir et les meneurs de la contestation au Soudan ont signé, samedi 17 août, la « déclaration constitutionnelle », finalisant un accord historique ouvrant la voie à un transfert du pouvoir aux civils, dont la population espère qu’il lui apportera liberté et prospérité. Une cérémonie s’est déroulée dans l’après-midi à Khartoum sur les bords du Nil pour la signature des documents qui définissent les 39 mois de transition à venir.

L’accord a été signé par Mohammed Hamdan Daglo, numéro deux du Conseil militaire, et Ahmed Al-Rabie, représentant de l’Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance de la contestation, en présence de chefs d’États, de Premiers ministres et de dignitaires de plusieurs pays.

Si la voie vers la démocratie risque d’être encore longue, l’humeur est toutefois à la célébration dans la capitale où des dignitaires étrangers et des milliers de Soudanais affluaient dès vendredi pour l’occasion. L’accord conclu début août a mis fin à près de huit mois d’un mouvement de contestation inédit qui a mené à la chute du président Omar el-Béchir, resté trente ans au pouvoir, avant de se retourner contre les généraux du Conseil militaire de transition qui a pris sa succession.

Conclu à la faveur d’une médiation de l’Éthiopie et de l’Union africaine, cet accord a été accueilli avec soulagement des deux côtés, les manifestants célébrant la victoire de leur « révolution » et les généraux s’attribuant le mérite d’avoir évité une guerre civile.

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« Pouvoir civil »

À Atbara, une ville du centre du pays où ont eu lieu les premiers rassemblements contre la décision du gouvernement de tripler le prix du pain le 19 décembre, certains dansaient et chantaient sur les quais de la gare avant de partir pour Khartoum, d’après des images postées sur les réseaux sociaux. « Pouvoir civil », scandaient-ils, promettant de venger ceux qui ont péri dans la répression des manifestations.

Les premières étapes de la transition devraient suivre la signature avec l’annonce dimanche de la composition du Conseil souverain, qui doit compter onze membres (cinq nommés par chacune des deux parties) ainsi qu’une personnalité civile. Jeudi, l’ALC a désigné Abdallah Hamdok, un ex-économiste de l’ONU, pour devenir Premier ministre. Le Conseil souverain doit annoncer mardi s’il le confirme à ce poste. La composition de son gouvernement sera ensuite détaillée le 28 août.

Des élections prévues en 2022

Abdallah Hamdok aurait alors la lourde tâche de relever l’économie du pays qui s’est écroulée après que la sécession du Sud en 2011 l’a privée des trois quarts de ses réserves de pétrole. Inflation et pénuries ont été des moteurs de la contestation. Des élections sont prévues pour 2022 mais beaucoup de Soudanais doutent d’ores et déjà des capacités des institutions de transition à limiter le pouvoir de l’élite militaire.

Si ceux-ci sont minoritaires au sein des 11 membres du Conseil souverain qui doit gouverner 40 millions de Soudanais, ce conseil sera d’abord dirigé par un général pendant 21 mois. Et les ministres de l’Intérieur et de la Défense seront choisis par les militaires. « Les dynamiques politiques auront plus d’importance que des bouts de papier », affirme Rosalind Marsden, du groupe de réflexion Chatham House établi à Londres.

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« Le plus gros défi du gouvernement sera le démantèlement des (entités informelles) islamistes qui ont pris le contrôle de toutes les institutions de l’État et des secteurs clés de l’économie », ajoute-t-elle. Le Premier ministre éthiopien participera à la cérémonie aux côtés de dirigeants d’autres pays de la région.

250 morts lors des manifestations

L’une des premières conséquences de l’accord en matière diplomatique devrait être la levée de la suspension, en juin, du Soudan de l’Union africaine. Le général Mohammed Ali Ibrahim, membre du Conseil militaire de transition, a dit vendredi que la signature « rouvrirait la porte aux relations internationales pour le Soudan ».

Le jour de la signature devait aussi être celui de l’ouverture du procès de l’ex-président, inculpé pour corruption, mais celle-ci a été repoussée à une date indéterminée. Au sein du mouvement de contestation, certains affirment que l’accord n’est pas suffisant pour contrecarrer le pouvoir des militaires et garantir que justice soit aussi faite pour les quelque 250 personnes qui sont mortes lors des manifestations, selon un comité de médecins proche des protestataires.

Les groupes rebelles des régions marginalisées du Darfour, du Nil Bleu et du Kordofan ont été les grands absents de la cérémonie de signature. Le Front révolutionnaire soudanais, qui réunit ces groupes, a soutenu la contestation mais a rejeté la déclaration constitutionnelle de l’accord, exigeant de participer au gouvernement et davantage de garanties concernant le processus de paix les concernant.

Source: France 24/Mis en ligne :Lhi-tshiess Makaya-exaucée

Tribune d'Afrique

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