Amnesty International a exhorté, lundi 11 octobre, la junte au pouvoir au Tchad à « arrêter la campagne d’intimidation contre les voix dissidentes » et à « protéger la liberté d’expression », deux jours après des manifestations dispersées par la police à coups de gaz lacrymogènes. Les rassemblements de samedi, à l’appel de Wakit Tama, une plateforme de partis d’opposition et de membres de la société civile qui réclame un pouvoir civil, avaient été interdits par les autorités, à cause de risques de « troubles à l’ordre public ».
Mais plusieurs centaines de personnes étaient descendues dans les rues de la capitale, N’Djamena. « Les forces de sécurité ont tiré des gaz lacrymogènes, blessé plusieurs personnes et arrêté des dizaines de manifestants qui ont été libérés le jour même », a déclaré dans un communiqué Abdoulaye Diarra, chercheur Afrique centrale à Amnesty International.
Selon l’ONG, l’accès à Internet était ralenti durant la manifestation. « Ces apparentes restrictions doivent faire l’objet d’une enquête et les Tchadiens doivent pouvoir accéder et échanger librement des informations en ligne », a poursuivi M. Diarra.
Selon la Convention tchadienne des droits de l’homme (CTDDH), trois militants de Wakit Tama ont été placés en garde à vue lundi, notamment pour des faits de « trouble à l’ordre public et destruction de biens publics ». La CTDDH « condamne avec la dernière énergie cette arrestation arbitraire » et « exige leur libération immédiate et sans condition ».
Projet de Constitution
Le 20 avril, en annonçant la mort du maréchal Idriss Déby Itno qui venait d’être déclaré réélu chef de l’Etat après trente années au pouvoir sans partage, son fils, le général Mahamat Déby, avait été proclamé par l’armée chef de l’Etat, à la tête d’un Conseil militaire de transition (CMT) composé de quatorze autres généraux fidèles à son père.
Le CMT avait aussitôt révoqué le gouvernement, dissous l’Assemblée nationale et abrogé la Constitution.
Depuis la prise de pouvoir du CMT, « au moins seize personnes ont été tuées durant des manifestations à N’Djamena et à Moundou », dans le sud du Tchad, a poursuivi M. Diarra qui souligne que « les résultats des enquêtes se font encore attendre ».
La junte a promis des élections « libres et transparentes » dans un délai de dix-huit mois, renouvelable une fois, et a finalement désigné, le 24 septembre, un Parlement intérimaire, le Conseil national de transition (CNT).
Le général Déby n’a pas exclu récemment de prolonger la transition de dix-huit mois si « certaines conditions » n’étaient pas remplies, notamment que le « dialogue » censé déboucher sur un projet de Constitution avance « au rythme prévu et sur le versement d’une aide financière internationale ».
Source: Le Monde Afrique/ Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée