La RDC devient le 7e membre de la Communauté d’Afrique de l’Est. Un élargissement très prometteur sur le plan commercial, mais qui représente aussi un défi politique majeur.
« Un jour historique » pour Uhuru Kenyatta, le chef de l’État kényan qui préside l’EAC (Communauté d’Afrique de l’est). « Un grand événement d’importance », pour le président ougandais, Yoweri Museveni : l’entrée de la République démocratique du Congo dans l’organisation régionale a été entérinée ce 29 mars, lors d’un sommet en ligne des dirigeants des États membres.
Le processus d’adhésion de Kinshasa a été accéléré, l’EAC ayant conscience que les ressources congolaises, en métaux précieux notamment, constituent un potentiel commercial unique.
Augmentation de 28 % des exportations
Selon les données disponibles, les membres de l’organisation régionale ont exporté vers la RDC 941 millions de dollars de marchandises en 2019, alors que leurs importations ne représentaient que 5 % de la valeur de ces exportations.
Une étude du Centre de recherche sur les politiques économiques, un groupe de réflexion de Kampala, indique que la Communauté d’Afrique de l’Est pourrait gagner 240 millions de dollars supplémentaires par an en volume d’exportation – soit une augmentation de 28 % – grâce au commerce avec la RDC. Le Rwanda et l’Ouganda en seraient les principaux bénéficiaires.
Selon l’économiste Aaron Ecel, l’EAC pourrait bénéficier des importations de la RDC qui sont aujourd’hui largement captées par des pays qui n’en sont pas membres, comme la Zambie : « La RDC importe des denrées alimentaires pour 514,2 millions de dollars de Zambie, un pays qui ne présente aucun avantage géographique par rapport aux autres États de l’EAC », note-t-il.
Fixer un cadre
Pour que l’intégration de la République démocratique du Congo au sein de l’EAC soit une vraie plus-value, Aaron Ecel souligne qu’il sera indispensable de déterminer quels sont les biens les plus recherchés en RDC : « Sans cette connaissance et sans fixer des conditions commerciales préférentielles, l’union risque de ne rester qu’un ensemble politique ».
À ce jour, l’EAC exporte vers la RDC des aliments transformés, des produits sidérurgiques, du ciment, des produits pétroliers et des produits à base d’huile de palme. Avec l’arrivée du Congo, la communauté a la possibilité de devenir une plaque tournante de l’exportation à condition de s’organiser en hub d’assemblage de produits de haute technologie tels que des machines, des équipements électriques et des véhicules à moteur.
Pas de commerce sans stabilité
Avant son adhésion, la RDC avait déjà été sollicitée par des pays de la région : en novembre dernier, le Kenya avait organisé une mission commerciale à Kinshasa, Lubumbashi, Goma et Mbuji Mayi. Nairobi prévoit d’ouvrir un consulat à Goma et de nommer un Consul honoraire à Lubumbashi, ces présences dans le Nord et le Sud Kivu devant faciliter le commerce.
Même chose pour l’Ouganda : l’année dernière, un projet de construction d’une route commune longue de 223 kilomètres a été lancé. En novembre 2021, des soldats ougandais et congolais ont lancé une opération militaire pour combattre les rebelles des Forces démocratiques alliées (ADF) le long de la frontière entre les deux pays. L’Ouganda a fait valoir que les opportunités commerciales ne peuvent être pleinement exploitées si certaines parties de l’est de la RDC restent en proie à l’insécurité.
Enfin, la course pour devenir le partenaire privilégié de la RDC risque d’exacerber les tensions existantes entre les États membres de l’EAC.
Défis de taille
La RDC reste un des pays les plus pauvres au monde : la Banque mondiale estime que 73 % de la population congolaise, soit 60 millions de personnes, vit avec moins de 1,90 dollar par jour.
C’est donc une population au pouvoir d’achat très faible qui rejoint l’EAC. Par ailleurs, la faiblesse des infrastructure et l’insécurité constante à la frontière avec l’Ouganda constituent des défis de taille.
Source: Jeune Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée