Les Libyens surpris de voir certains membres du Dialogue politique parler de référendum constitutionnel avant les élections. Positions contradictoires à Genève où l’on croyait pouvoir s’entendre sur la plateforme constitutionnelle des élections du 24 décembre.
Les Libyens s’attendaient à la validation par le Dialogue politique, réuni depuis lundi dernier à Genève, d’une règle constitutionnelle pour les élections générales du 24 décembre 2021. Mais, à la surprise générale, certains délégués ont appelé hier pour faire passer d’abord le référendum sur la Constitution et renvoyer, à plus tard, les élections générales. Il s’agirait alors de prolonger les prérogatives pour le pouvoir provisoire en place. Plusieurs acteurs, notamment la communauté internationale, ont été pris de court. D’autres délégués ont réagi, demandant à quitter la réunion si elle opte pour ce choix.
Alors que les Libyens s’attendaient à voir le Dialogue politique s’entendre sur la plateforme constitutionnelle des nouvelles élections générales prévues le 24 décembre prochain, ils ont été surpris par l’émergence de voix appelant à faire passer d’abord un référendum sur la Constitution.
S’ouvre alors une polémique imprévue à Genève. En effet, Mouadh Manfoukh, le délégué islamiste appartenant au Parti de la justice et du développement (PJD), le bras politique de l’organisation des Frères musulmans en Libye, a lancé le débat sur la question, coupant ainsi court aux discussions sur la plateforme constitutionnelle, ce qui constitue un putsch par rapport à la feuille de route prévue.
Pareils propos ont poussé la déléguée au Dialogue politique, Saïda Yaâkoubi, à accuser une minorité, servant des lobbies, de «recherche de prolongation indéterminée du pouvoir intérimaire, qui leur a accordé des intérêts». L’autre délégué, Ahmed Cherkessi, a dit refuser cette intrusion, «opposée à l’esprit de la feuille de route du Dialogue politique».
Cherkessi menace de quitter Genève s’il y a déviation sur la feuille de route originale.Le délégué de l’ONU en Libye, Jan Kubic, atteint de Covid, a rappelé (à distance) les délégués libyens à Genève de se maintenir dans le cadre des objectifs de la feuille de route. Mais, le dialogue reste souverain dans ses décisions, surtout lorsqu’il y a des acteurs qui défendent des thèses opposées à celles énoncées dans l’ordre du jour.
A part l’islamiste Manfoukh, la libérale Amel Bouguiguis n’a pas écarté la possibilité de «voter la Constitution avant les élections pour éviter de recourir à une plateforme constitutionnelle provisoire».Advertisements
Mais, un référendum et des élections générales, c’est lourd à gérer, comme l’assure le politologue Sultan Barouni, qui trouve que «certaines parties, notamment les Frères musulmans, ne veulent pas d’élections en Libye, parce qu’ils sont conscients d’avoir perdu leurs bases». Le politologue rappelle que «la guerre civile en Libye a surgi l’été 2014 parce que les Frères musulmans et leurs alliés ont perdu les élections».
La délégation de l’ONU en Libye travaillait depuis le début de la semaine sur une issue rapide de la conférence de Genève, pour assurer une plateforme constitutionnelle aux élections du 24 décembre.
Mais, il ne suffit pas que les Libyens ne parviennent pas à finaliser ladite plateforme avant le 1er juillet, date fixée par l’instance électorale, le Dialogue politique ne parvient pas encore à une entente sur l’issue prévue. L’actuel président du Parlement, Aguila Salah, a appelé, à partir d’Athènes, à préparer l’arsenal institutionnel pour les élections, seule issue pour la sortie de crise en Libye. Pour Aguila, une semaine de retard peut être récupérée par l’instance des élections, encore faut-il qu’il y ait entente entre toutes les parties.
Perspectives
Par ailleurs, et toujours en rapport avec la stabilité en Libye, le président américain Joe Biden a manifesté dans une lettre à son homologue algérien, Abdelmadjid Tebboune à l’occasion de la Fête nationale algérienne, son appréciation du «partenariat et des efforts bilatéraux pour le maintien de la stabilité dans la région, notamment en Libye et au Sahel».
Le président Tebboune a exprimé, lui aussi, dans sa lettre de félicitations à son homologue américain à l’occasion de la Fête nationale américaine, «la volonté de l’Algérie de promouvoir les relations de coopération en partenariat économique plus efficient». Les observateurs ont lu dans cet échange une volonté américaine de renforcer sa coopération avec l’Algérie en matière de lutte contre le terrorisme.
A ce titre, le spécialiste tunisien des questions terroristes, Bassel Torjmane, attire l’attention au fait que «la France se prépare à mettre fin à l’opération Barkhane» et que «les Américains ont régulièrement sollicité ses troupes au Niger, au Burkina et dans d’autres pays», en ajoutant en conclusion que «les Américains peuvent compter sur un partenariat avec l’Algérie, qui dispose d’une grande expérience en matière de lutte contre le terrorisme, d’autant plus que la Constitution algérienne amendée permet à l’armée d’être déployée en dehors des frontières sous l’égide de l’ONU ou de l’Union africaine».
Source : El Watan/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée