Paroles engagées, décor en noir et blanc, des corps ensevelis dans des linceuls. Pendant quatre minutes, des jeunes de Goma réclament justice pour les victimes des violences dans leur région.
Ben Kamuntu et Justin Kasereka, respectivement slameur et réalisateur font une prouesse artistique que l’on peut découvrir avec la chanson « Bosembo », (justice en français) ce mardi 09 mars sur YouTube.
Le rapport mapping au coeur du processus de creation
« Bienvenue à New York au Conseil de sécurité de l’Onu, le rapport mapping git ici ». Ce sont là les paroles qui donnent le ton de Bosembo, cette chanson composée par un collectif de jeunes de Goma.
Ils plaident pour plus de justice et pour une paix durable. Ben Kamuntu est slameur, il fait partie du mouvement « Lutte pour le changement » (Lucha).
Né dans une région où la violence fait partie du quotidien des habitants, il explique la démarche qui l’a poussé à embrasser ce projet.
« Je fais partie des millions de jeunes congolais qui sont nés dans les années 1990. En soit, nous sommes une génération de guerre, nous n’avons jamais connu la paix », confie le jeune slameur tout en insistant sur le fait qu’ « il y a des millions de Congolais qui sont décédés : nos frères, nos cousins, nos voisins et c’est quelque chose qui est lié à moi, à ma vie, à ma région lié à mon vécu quotidien. C’est ce qui m’a inspiré en premier lieu. Les paroles de ce slam proviennent de cette frustration, de cette révolte, de cette envie de paix, mais aussi de cet espoir de voir un jour une paix durable dans la région.
L’espoir de voir la paix s’installer à nouveau à Goma, c’est le fil conducteur de ce projet artistique traduit en images par Justin Kasereka. Connu pour son œuvre engagée, Justin Kasereka illustre des scènes de vie mais pas que.
Les grands héros africains des indépendances font aussi partie intégrante de son œuvre. Il met l’accent sur la résilience du peuple congolais.
« Nous sommes des survivants, nous ne sommes pas des victimes mais nous sommes des survivants. Nous ne pouvons évoluer que par une lutte qui commence par nous tous. C’est pour ça qu’au fil de la vidéo nous montrons plusieurs aspects comme la résilience, le fait que le peuple se lève et que nous prenions conscience de ce que nous faisons, de ce que nous sommes et de ce qui nous est arrivé. »
A ce jour, le rapport Mapping reste un des principaux instruments du plaidoyer pour une paix durable en RDC.
L’art, une arme redoutable
Pour Thomas Fessy, chercheur principal pour la RDC à Human rights watch, il est important de soutenir des initiatives comme celle de ces jeunes artistes de Goma parce que, dit-il, l’art en soit peut être une forme d’activisme.
« Qu’ils soient photographes, vidéastes, peintres, sculpteurs, musiciens ou danseurs, nombreux sont ceux qui à leur manière exposent, dénoncent, éduquent ou éveillent les consciences en faveur du respect des droits humains. A Human Rights Watch nous croyons fortement à ce lien entre artiste et activistes qui interpellent le pouvoir quand il le faut, » estime le chercheur.
Dans cette chanson coup de poing, les jeunes réclament justice et espèrent un jour vivre autre chose que les violences qui les ont bercés jusque là. « Tuna taka uhaki » disent-ils en swahili… Nous voulons la justice.
Source: Deutsche Welle Afrique/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée