À l’issue de deux semaines de discussions et deux jours supplémentaires de négociations, la COP25 s’est refermée dimanche sur un accord minimal, douchant les espoirs des pays en développement, notamment des pays africains de plus en plus touchés par les conséquences de la crise climatique.
Au lendemain de la clôture de la conférence climat de l’ONU, la COP25 a laissé un goût amer aux pays en voie de développement, au premier rang desquels se trouvent nombre de pays africains.
Pour cette nouvelle COP, qui vient de clore une année marquée par des catastrophes climatiques, des manifestations sans précédent pour le climat et des rapports scientifiques toujours plus inquiétants, les pays en développement espéraient des avancées sur les sujets les concernant. En particulier la question des pertes et préjudices, c’est à dire l’assistance aux pays en développement pour s’adapter aux incidences du dérèglement climatique
Mais après deux semaines de négociations, aucun des grands pays émetteurs n’a pris de décision significative, ni revu ses ambitions à la hausse.
« L’Afrique subit durement les effets des dérèglements climatiques », a tweeté le président gabonais, Ali Bongo Ondimba, après s’être vu confier la présidence des négociateurs africains sur le climat. « Nous redoublerons d’efforts pour que l’Accord de Paris soit respecté. J’y veillerai ».
« Il s’agit réellement d’une urgence »
Directeur exécutif de l’Organisation des Jeunes engagés pour le développement durable (OJEDD) au Togo, et coordinateur Afrique du groupe de réflexion CliMates, Kévin Ossah se dit déçu, bien qu’il admette ne pas en avoir attendu davantage. « L’ensemble des pays attendaient des décisions urgentes et concrètes pour l’action climatique des pays riches, mais le problème c’est qu’il n’y pas eu de position commune par rapport à la question relative aux pertes et dommages ; ni par rapport aux 100 milliards de dollars annoncés depuis Copenhague [le fonds vert pour le climat, NDLR] ; pas de mesures concrètes par rapport à l’article 6 sur la compensation du carbone », énumère-t-il.
Le dossier de l’augmentation de la taxe carbone, actuellement fixée à 2% et prélevée aux plus gros pollueurs pour financer un « fonds d’adaptation » permettant aux pays les plus vulnérables de lutter contre les changements climatiques, a en effet été repoussé à la prochaine COP. L’objectif du fonds vert à destination des pays les moins armés pour faire face aux conséquences de la crise climatique (sécheresses, inondations), quant à lui, peine à être atteint.
« La réalité des changements climatiques est toute autre en Afrique, et il s’agit réellement d’une urgence », rappelle Kevin Ossah. Une urgence à laquelle il a souhaité répondre, en 2017, en créant l’OJEDD afin de « résoudre les problèmes au niveau africain, par une approche adaptée aux réalités africaines ». L’association compte aujourd’hui des représentants dans une dizaine de pays, notamment au Niger, au Sénégal, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire et au Cameroun.
Jeunesse engagée en quête de soutien
L’Afrique, qui compte 17 % de la population mondiale, ne représente que 4 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) mondiales. Pourtant, les choix des pays africains en matière d’énergie détermineront, demain, la manière dont la crise climatique pourra être limitée. Mais la voie empruntée par l’Afrique dans le développement de ses énergies ne dépend-elle pas de l’aide que celle-ci recevra d’autres régions ?
En Afrique subsaharienne, près des deux tiers de la population vivent sans électricité. Dans un tweet publié durant la COP25, Kevin Ossah notait le caractère « inconcevable » de voir plusieurs régions togolaises manquer encore d’électricité dans un pays bénéficiant du « taux le plus élevé d’ensoleillement ».
« Dans ce message, tout est dit », explique celui qui travaille également dans le secteur de l’énergie solaire. « Le problème, les moyens dont nous disposons, et la solution. Il nous faut juste une politique orientée vers l’action concrète ».
Faute de partenaires, l’OJEDD n’a pas eu « la chance » d’envoyer de représentants à Madrid. Mais preuve de l’engagement croissant des jeunes pour le climat, de nombreux représentants de la société civile africaine partageaient, directement depuis la capitale espagnole, les instances et le déroulement des activités, se félicite Kevin Ossah, ajoutant qu’une plateforme de discussions avait même été créée pour partager messages, photos et vidéos de l’événement.
Plus que la voix des États, le directeur de l’association dit vouloir « porter la voix des jeunes Africains ». Des jeunes qui, à travers des marches et actions de sensibilisation, entendent influencer les prises de décisions. Des jeunes qui se mobilisent sur le terrain pour un programme d’éducation à l’environnement et au développement durable. Des jeunes qui, à terme, entendent développer des solutions innovantes adaptées aux réalités africaines, et pouvant être dupliquées dans d’autres pays en développement.
« Les jeunes sont d’autant plus engagés pour réfléchir à trouver des solutions et travailler sur des projets concrets et adaptés à nos réalités », affirme Kevin Ossah. « Il faut donc que les États et l’aide internationale au développement s’insèrent dans cette vision et dynamique d’accompagner et soutenir les jeunes porteurs d’initiatives de changement ».
Source: France 24/Mis en ligne: Lhi-tshiess Makaya-exaucée