Le gouverneur de Kinshasa a annoncé jeudi la mise en quarantaine de la commune de la Gombe pour 14 jours, à partir du 6 avril. Ce quartier huppé de Kinshasa, cœur politique, diplomatique et économique de la ville, est considéré comme « l’épicentre de l’épidémie » dans le pays.
À partir de lundi, la commune de la Gombe sera confinée pour une durée de 14 jours, a annoncé jeudi 2 avril le gouverneur de Kinshasa, Gentiny Ngobila, lors d’une intervention radio-télévisée. Siège du gouvernement, des grandes ambassades, de plusieurs banques, la commune de la Gombe « est considérée comme l’épicentre de l’épidémie dans la ville », a précisé le gouverneur.
D’après le rapport de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) datant du 3 avril, la République démocratique du Congo comptait 148 cas de Covid-19 confirmés, incluant 16 décès. Kinshasa rassemble le plus grand nombre de cas avec 136 malades, mais quatre autres provinces sont également touchées (Ituri, Kwilu, Nord-Kivu et Sud-Kivu).
« Pour le moment, le foyer le plus touché est la commune de la Gombe, à Kinshasa où se trouvent les VIP, les personnes qui ont voyagé », a confirmé vendredi sur RFI le professeur Jean-Jacques Muyembe, à la tête de la réponse nationale congolaise contre le Covid-19. Le premier cas de nouveau coronavirus dépisté en RD Congo le 9 mars était d’ailleurs un voyageur qui revenait de France.
Pendant 14 jours, les habitants de la Gombe auront interdiction de se déplacer. Le chef de la police de Kinshasa, le général Sylvano Kasongo, a indiqué sur la radio Top Congo FM que la police allait se déployer dans la commune de la Gombe à partir de dimanche soir afin de faire respecter le confinement.
Il a également indiqué que cinq voies d’accès seraient mises en place pour permettre aux personnes habilitées d’entrer dans la commune. Ces cinq voies d’accès seront le « pont Flambeau, le croisement des avenues Mont des Arts et Huileries, le croisement Libération et Mont des Arts, le croisement Shaumba et Haut-commandement et le Pont Itanga-Asbl dans la commune de Kintambo, au niveau de Socimat », a-t-il détaillé.
Un service minimum
« La mesure veut que personne ne circule mais il y aura des exceptions (pour) ceux qui auront des jetons, qui seront donnés par le gouverneur », a-t-il déclaré. Les membres du personnel soignant, les journalistes ainsi que les employés des banques et des services de télécommunications seront autorisés à circuler.
Les ouvriers et employés venant d’autres communes pour travailler à la Gombe devront se munir d’un laisser passer. La Fédération des entreprises congolaises a invité les entreprises de la commune à organiser un service minimum. Au maximum, dix personnes par entreprise seront autorisées à entrer dans la Gombe. Les sociétés avaient jusqu’à vendredi matin pour remettre à la fédération la liste de ces personnes.
Interrogé vendredi sur Radio Okapi, le gouverneur de Kinshasa a par ailleurs précisé que le marché central de Kinshasa, situé dans la commune de la Gombe, serait également fermé.
« Personne n’est à l’abri »
Dès vendredi matin, des journalistes locaux ont fait état d’importants mouvements de population cherchant à quitter la Gombe. Pour mettre un terme à ces déplacements, Fabrice Ngoy Kazadi, le bourgmestre de la commune, s’est adressé à ses administrés sur Top Congo FM.
« Je demande à tous les administrés de la commune de la Gombe de rester calmes. Que personne ne se sente en insécurité ou qu’il déménage pour aller vers les autres communes », a-t-il exhorté.
Pour tenter d’empêcher les habitants de se déplacer, le bourgmestre a insisté : « La police et moi-même serons sur le terrain jour et nuit pour faire respecter le confinement […] Personne n’est à l’abri. Cette maladie concerne tout le monde, nous sommes tous concernés par la lutte contre ce virus », a-t-il encore souligné.
Équipe de la « riposte »
Le confinement de la Gombe doit permettre d’isoler ses habitants du reste de la capitale, qui compte plus de dix millions d’habitants. Mais ce confinement partiel de Kinshasa est critiqué tant par la société civile que par des politiques.
Interrogée par RFI, Eunice Etaka, une militante du mouvement citoyen Lutte pour le changement, estime que le seul confinement de la Gombe est inutile. « Ce qu’ils ignorent, c’est que les mêmes gens qui habitent Gombe ont des villas et des maisons dans d’autres communes. Et en ce moment, la plupart d’entre eux commencent déjà à vider la commune. En fin de compte, on va confiner les immeubles, les bureaux et les boulevards, et laisser les malades se balader. C’est trop d’amateurisme au sommet de l’État », dénonce-t-elle.
Des membres du gouvernement provincial de Kinshasa ont également plaidé pour un confinement total de la capitale, rapporte encore RFI. Eux aussi ont avancé que la majeure partie des gens qui circulent ou sont employés dans le quartier de la Gombe viennent d’autres communes de la capitale.
Le gouverneur de Kinshasa avance que le confinement de la Gombe doit permettre à l’équipe de la « riposte » au Covid-19 de s’organiser « pour rechercher les personnes malades, mais aussi investiguer les contacts à risque et les cas symptomatiques sur toute l’étendue de Kinshasa pour leur dépistage et prise en charge ».
La démarche sanitaire prévue est que si un malade présente des symptômes bénins, il devra se placer « en isolement volontaire à domicile », a souligné Jean-Jacques Muyembe sur RFI. « Si le cas est grave, il [sera] conduit dans un centre de traitement. Nous avons choisi certains pavillons des hôpitaux existants. Les hôpitaux privés font aussi partie de notre équipe de soins », a ajouté le directeur général de l’Institut national de recherche biomédical (INRB) de Kinshasa.
La ville de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu sera, elle aussi, placée en confinement pour 14 jours à partir du 6 avril, a annoncé vendredi le gouvernement de la province.
Source: France 24/Mis en Ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée