Il est l’un des plus jeunes candidats pour la prochaine présidentielle. Cela aurait pu justifier, en partie, ce côté naïf, plutôt innocent qu’il dégage, croyant certaine, sa victoire en février prochain. Alors qu’il ne dispose ni de colossaux moyens financiers, ni même d’une expérience de gouvernement ou encore d’une popularité conséquente, Dr Thon y croit dur comme fer. Pour ce pragmatique qui a fait une grande partie de son parcours aux Etats-Unis, « y croire, c’est y arriver » et sa stratégie est celle de proximité. Jeunes, femmes, défavorisés, il cible les plus vulnérables et apporte des solutions pratiques à leurs problèmes du quotidien à travers diverses initiatives. Alors que la clôture des candidatures devrait intervenir dans quelques jours, il se fait discret à Lomé pour mieux peaufiner sa stratégie. Dans le cadre de son Special Togo, Afrika Stratégies France l’a rencontré à Lomé où en banlieue côtière, il vit depuis son retour au pays. Interview !
Vous semblez, à la limite même d’une certaine naïveté, si sûr de votre victoire en février prochain. Qu’est ce qui justifie cet excès d’optimisme quand on sait que le président sortant rempile ?
Je pense que quand on va à une élection, on n’y va pas en tant que perdant. Au delà de cela, lorsque vous avez un programme qui prend en considération l’intérêt de tous les acteurs impliqués dans la crise que nous traversons aujourd’hui, lorsque vous avez un programme dans lequel toute la jeunesse togolaise s’identifie, lorsque vous avez un programme qui restaure l’espoir de tout un peuple , vous ne pourrez qu’avoir cent pour cent de chance de réussir.
Quelle sont les grandes lignes de votre projet de société et qu’est ce qui change fondamentalement par rapport à ce qui se fait ?
Il faut juste faire une rétrospection des résultats des politiques mises en place depuis plusieurs années pour voir ce qui n’a pas marché. Nous avons aujourd’hui un taux de chômage très élevé ; nous avons devant le service des passeports de longues lignes d’attente des citoyens qui veulent quitter la misère du pays ; nos mamans reviennent chaque soir de leurs activités très dépitées. Ces quelques exemples montrent l’échec cuisant des politiques en place. C’est pour cela que notre programme est plus axé sur la création des emplois, sur la justice sociale. Nous voulons faire du Togo un pays qui permet à ses citoyens de rêver et d’avoir espoir que leur rêve peut se réaliser. Notre programme est un programme de développement contrairement au développement de la politique que nous avons connu depuis plusieurs années. La Nouvelle Vision se démarque aujourd’hui des autres par cette démarche objective de voir tous les acteurs ensemble avec cette finalité de cerner cette nation. Cerner la nation pour nous n’est pas obligatoirement de voir en une alternance la finalité. La finalité pour nous est de pouvoir résoudre tous les problèmes socio-économiques de cette nation. Voila ce qui nous démarque de ces politiques passées.
De la Togolese fundation à NOVI, qu’est ce qui a changé dans le fond et la forme ?
Rien n’a changé. Mais nous pouvons nous demander ce qui a évolué. Nouvelle Vision est une continuité de ce désir de voir cette nation s’épanouir. Le fondement de l’idée que nous avons en créant la Togolese fundation, c’est de permettre à la jeunesse togolaise de servir d’éléments incitateurs du développement de notre communauté. Mais arrivé à une étape nous avons constaté que ce développement tant souhaité et pour lequel nous avons consenti tant d’efforts n’a pas pris l’élan escompté a cause de la situation socio-politique qui bloque toute idée de développement au Togo. C’est ce qui explique d’ailleurs la mutation de la Togolese fundation en mouvement Nouvelle Vision qui n’est qu’une continuité de ce désir et de cette passion de voir le Togo évoluer mais qui a désormais besoin de cet outil qu’est la magistrature suprême afin de mettre sur pied un véritable programme national qui posera désormais les véritables bases du développement de notre pays. Voilà ce qui justifie l’évolution de la Togolese fundation vers la Nouvelle Vision ; un mouvement qui rassemble les jeunes autour d’une idéologie de construire une nation soudée, une nation émergée.
Vous considérez-vous comme un homme politique ou un homme d’affaires qui veut utiliser la politique pour changer les choses ?
Je ne suis pas un homme d’affaires. Je suis simplement un citoyen qui est à la quête de l’outil qui lui permettra de développer son pays. Je ne manque jamais d’occasion de rappeler aux gens que je ne suis pas politicien. Les politiciens ont pour objectif de le demeurer. Le souci de voir la jeunesse évoluer qui est en nous depuis la création de la Togolese fundation me pousse et m’oriente vers la recherche de cet instrument de développement qui en soit n’est pas ma finalité. La magistrature suprême que je brigue n’est qu’un instrument pour atteindre ma finalité.
Certains togolais pensent que vous faites le jeu du pouvoir. Quel bilan faites-vous des quinze années de Faure Gnassingbé ?
Le bilan est clair. Premier mandat, le Président Faure Gnassingbé nous a promis un mandat de réconciliation. Aujourd’hui les togolais sont plus divisés qu’avant. Deuxième mandat, on nous a parlé de la politique des grands travaux. Certes nous avons aujourd’hui certaines routes et certaines réalisations. Mais c’est à quel prix ? Le Togo a aujourd’hui dépassé tous les seuils de dette. Troisième mandat on nous annoncé un mandat social. Et c’est dans ce mandat social que le prix de l’essence et l’impôt augmentent tous les jours ; c’est dans ce mandat social que les difficultés des togolais se sont accrues. Aujourd’hui on nous annonce un quatrième avec des promesses qui seront encore faites. Nous pensons qu’il faut se rendre à l’évidence. Les trois mandats passés n’ont pas donné satisfaction à la jeunesse et à la population. La Nouvelle Vision vient apporter des résultats en faisant de tous les togolais les acteurs du développement.
L’idée d’une candidature unique existe au sein de l’opposition. Qu’en pensez-vous ?
Depuis que j’ai commencé par collaborer avec mes ainés de l’opposition notamment la C14 il n’a jamais été question d’une candidature unique comme cela s’est diffusé au sein de la population. Il a été plutôt été question d’une candidature concertée qui n’est pas forcement une candidature unique. Nous savons que ce que veut, aujourd’hui, la population c’est de voir les partis de l’opposition s’entendre pour aller aux élections. Mais il faut qu’on comprenne que cela ne voudra pas obligatoirement dire que ça débouche sur une candidature unique. Nous avons déjà expliqué lors des rencontres avec Monseigneur Kpodzro que ce n’est pas la candidature unique qui garantit une alternance. Il faut ajouter à cette candidature une stratégie appropriée. Il est possible de gagner avec une candidature unique mais sans une bonne stratégie ceci n’est pas possible. Alors a défaut d’une candidature unique il faut penser à une candidature concertée c’est-à-dire donner la possibilité aux candidats qui ont plus de chance de se présenter et au deuxième tour penser aux alliances pour optimiser les chances pou battre Faure Gnassingbé. Mais s’il doit avoir une candidature unique, nous serons partant tant qu’elle se loge dans cette nouvelle dynamique de porter des résultats satisfaisants à notre génération.
Vous êtes associés à l’initiative de Mgr Kpodzro pour booter Faure Gnassingbé dehors. Le prélat est sous le coup de certaines menaces. Que pensez-vous de cette situation ?
Nous pensons qu’il faut clarifier les choses. Nous ne sommes pas dans une initiative de Monseigneur Kpodzro qui veut, comme vous le dites, booter Faure Gnassingbé dehors. La Nouvelle Vision n’est pas dans cette dynamique car ce qui justifie même la naissance de la Nouvelle Vision de se départir de cette lutte de nos ainés qui n’a rien apporté jusqu’alors aux togolais. Ce que nous avons compris de l’initiative de Monseigneur Kpodzro c’est qu’il est important pour les forces vives de la nation et tous ceux qui rêvent d’alternance de se concerter et de s’accorder pour optimiser les chances pour une alternance. Aujourd’hui pour le régime, il y a deux préoccupations. Il y a la peur du lendemain et la peur de perdre des privilèges. En face il y a l’opposition qui a la soif de l’alternance. Mais tant que l’opposition se positionne comme un danger pour le pouvoir, il ne faut pas rêver d’une élection transparente. Aujourd’hui la jeunesse est en train de comprendre qu’on n’a pas besoin de chasser l’autre pour dire qu’on fait de la politique. Mais il faut un véritable plan de développement dans lequel chacun apportera sa compétence.
Est-ce à dire que les menaces qui planent sur Monseigneur Kpodzro ne vous émeuvent guère ?
Monseigneur Kpodzro, au-delà de son titre de prélat est un citoyen qui veut voir ce pays se développer. Son cri de cœur qu’il passe par les médias se justifie par le fait qu’il est témoin de la souffrance de ses compatriotes. Pour lui il faut que ceux qui se sont accaparés des richesses du pays puissent les partager avec les autres. La question est de savoir s’il est la personne indiquée pour donner un plan à suivre dans l’atteinte de cet objectif ? C’est la question à laquelle il faut répondre. Mais il faut savoir qu’en tant que religieux et citoyen il ne fait que sa partition. Et quand il le fait, la tâche nous revient d’apporter nos expertises pour atteindre les objectifs fixés. Rappelons-nous que ceux qui doivent descendre de ce pouvoir sont, au même titre que nous des togolais. Il faut penser aussi à leurs enfants qui ne doivent pas se voir chasser de ce pays après les efforts de leurs parents.
Si vous êtes élus en Février 2020, quelles seront vos premières actions ?
Toutes décisions que nous prendrons seront dynamiques par rapport à la réalité qui sévira au moment de notre prise de pouvoir. Prioritairement il s’agira pour nous de trouver des solutions aux besoins fondamentaux de la jeunesse. Il s’agit pour nous des questions d’emploi, de bien être de cette jeunesse. Au moment venu, nous pouvons aussi opter pour des décisions intermédiaires allant dans ce sens. Mais il faut reconnaitre qu’il est un peu précoce pour nous de parler des premières décisions. Mais toute décision en 2020 mettra plus l’accent sur le mieux être des populations togolaises.
Propos recueillis par Emmanuel Amegee, Correspondant Lomé, Afrika Stratégies France