Un prestigieux prix littéraire a été décerné, lundi soir, au poète et journaliste érythréen Amanuel Asrat, disparu dans une prison de son pays depuis septembre 2001. C’est le poète britannique d’origine jamaïcaine, Linton Kwesi Johnson, lauréat du prix PEN Harold Pinter 2020 décerné par le club fondateur du célèbre cercle d’écrivains, qui lui a remis en son absence le Prix international de l’écrivain de courage.
Amanuel Asrat est l’un des plus anciens prisonniers politiques du monde et, dit-on, l’un des derniers survivants des rafles organisées, il y a 19 ans, par le régime d’Asmara.
Sur les photographies qui restent de lui, Amanuel Asrat apparaît comme un homme d’une trentaine d’années, plutôt grand, plutôt fin, avec une longue moustache. Il était connu à Asmara pour ses textes sur la souffrance, sur la pauvreté et l’amitié, et surtout pour ses chansons sur « le fléau de la guerre qui brasse le destin », comme il l’a écrit dans l’un de ses plus célèbres poèmes.
Il était connu aussi pour son journal, Zemen (Le Temps), où les Érythréens découvraient chaque semaine la jeune scène artistique de l’époque et les dernières créations de ses amis, réunis dans les cercles littéraires qu’il avait fondés peu avant son arrestation.
Car on n’a plus aucune nouvelle d’Amanuel Asrat depuis le 23 septembre 2001. Ce matin-là, une semaine après la rafle des réformistes du parti au pouvoir et de l’armée, c’était au tour des intellectuels et des journalistes d’Asmara d’être tirés du lit, un à un, par la sécurité d’État et d’être jetés en prison. Le tout-puissant président Issayas Afewerki, toujours au pouvoir aujourd’hui, était alors contesté et craignait pour son trône.
Les témoignages d’anciens gardiens de prison disent qu’Amanuel Asrat serait encore vivant. Il serait l’un des rares prisonniers enfermés dans le pénitencier d’Eiraeiro, construit spécialement pour les détenus les plus célèbres dans les montagnes désertiques du nord du pays.
Source: RFI Afrique/ Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée