Nouakchott reçoit ce 25 février les chefs d’État des pays du G5 Sahel. Au-delà du bilan, l’occasion d’aborder les nombreux points non réglés.
Le G5 Sahel a rendez-vous à Nouakchott. Ce 25 février, Roch Kaboré, Idriss Déby Itno, Ibrahim Boubacar Keïta, Mahamadou Issoufou et Mohamed Ould el-Ghazouani se réunissent dans la capitale mauritanienne pour le 6e sommet de l’organisation régionale. L’occasion de faire un bilan six ans après la création du G5 Sahel.
Défi sécuritaire
Côté militaire, le constat est morose. Lancée en 2014 pour « coordonner et mutualiser les actions de ses membres dans les domaines du développement et de la sécurité », l’organisation, appuyée notamment par l’opération militaire française Barkhane, peine en effet à contenir les violences auxquelles fait face la région. Et ce, malgré une force conjointe de 5 000 soldats issus des forces armées des États membres. Mais la nouvelle présidence du G5 Sahel – qui sera confiée pour l’année à Mohamed Ould el-Ghazouani ce mardi à la suite de Roch Kaboré – pourrait changer la donne. Car jusqu’ici, la Mauritanie est le seul pays de la région à avoir été épargné par le cycle de violences en cours dans les autres pays. Depuis 2011, aucune attaque n’a été commise sur son sol. Contrairement au Mali, au Niger ou au Burkina Faso, dont les institutions sont de plus en plus fréquemment les cibles d’attentats, auxquels s’ajoutent les conflits intercommunautaires.
Des résultats liés à une politique sécuritaire mise en place sous Mohamed Oul Abdel Aziz et que le président mauritanien, ancien ministre de la Défense, pourrait mettre au service du G5 Sahel. « Mohamed Ould el-Ghazouani a une bonne connaissance des questions relatives à la sécurité et à l’anticipation des risques. Sa présidence est l’occasion de partager son expérience, confirme Abdoul Salam Bello, chercheur au Centre africain de l’Atlantic Council à Washington. Le siège du secrétariat permanent de l’organisation étant, en plus, à Nouakchott, la Mauritanie tient là une réelle opportunité de prendre le leadership du G5 Sahel sur la question sécuritaire. »
Crise humanitaire
Outre l’aspect militaire, les membres du G5 Sahel se pencheront aussi, lors de ce 6e sommet, sur leurs actions en matière de développement. En 2019, l’accent a été mis sur des projets liés « à l’eau, la santé, et aux chaînes de valeurs agropastorales dans chaque pays », affirme un communiqué de l’organisation. Cette approche, inhérente au G5 Sahel depuis sa création, vise à s’éloigner du « tout sécuritaire » qui, à lui seul, ne suffit pas à stabiliser la région, d’après les membres de l’organisation. Cette année, « une attention particulière a été portée aux populations des zones frontalières, en tenant notamment compte des besoins des déplacés et des réfugiés », nous apprend également le communiqué.
Si le sujet sera âprement discuté à Nouakchott, c’est que la situation est grave. La crise humanitaire en cours dans la région des trois frontières – Burkina, Mali, Niger – s’étend. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), la violence au Sahel a déplacé en un an plus de 700 000 personnes au Burkina Faso. Pour l’Unicef, plus de 4,8 millions de personnes pourraient être en situation d’insécurité alimentaire pendant la période de soudure de 2020, de juin à août. Un chiffre en augmentation de 50 % par rapport aux prévisions de 2019, aggravé par la réduction de l’accès à l’eau potable.
Concrétiser des projets de développement
Dans ce contexte, difficile de se rendre compte des actions du G5 Sahel en matière de développement. L’organisation a pourtant bien lancé un plan dédié, le Programme d’investissements prioritaires (PIP) 2019-2021. Objectif : la concrétisation d’une quarantaine de projets ciblant divers secteurs, dont l’électrification rurale, les infrastructures routières et portuaires et l’hydraulique villageoise. Mais si 13 % du budget du PIP a déjà été sécurisé par les États membres, les promesses de financement des bailleurs, de plus de deux milliards d’euros, tardent à se concrétiser. Et en attendant, la situation sur place empire.
Un constat que fait également Abdoul Salam Bello, tout en rappelant que « la mise en œuvre de projets de développement se fait sur un temps long ». « Au-delà de la question du financement, ce qu’il faut revoir, ce sont les mécanismes de concrétisation des projets sur place, souligne-t-il. Car même si de nombreuses promesses de dons se font encore attendre, les acteurs du développement ont affiché leur volonté de changer les choses. La question est maintenant de savoir comment leur argent, dont une partie a déjà été touchée par le G5 Sahel, se traduit en projets sur le terrain ». L’organisation régionale peut en effet d’ores et déjà compter sur la Banque mondiale, prête à investir 7,5 milliards de dollars dans les pays de la région entre 2020 et 2023.
Source: Le Point Afrique /Mis en ligne :Lhi-tshiess Makaya-exaucée