Le scandale qui a emporté l’ancienne présidente Ameena Gurib a porté un sérieux coup au prestige de la fonction présidentielle. Mais avec la démission de Barlen Vyapoory qui assurait l’intérim, l’Ile-Maurice se cherche un nouveau président dans cette République parlementaire. Parmi les favoris dans la course au fauteuil du Palais du Réduit, deux figures féminines sont en pôle position pour le retour d’une femme sur le fauteuil présidentiel.
Nouvelle victoire, nouvelles figures! Barlen Vyapoory se savait sur le départ depuis que l’Alliance Morisien du Premier ministre Pravind Jugnauth- dont il est proche–, a remporté les élections générales du 7 novembre dernier. Ce mardi 26 novembre, le président intérimaire de l’Ile-Maurice a finalement remis au président de l’Assemblée nationale, sa lettre de démission avec effet immédiat. Une décision prise d’un «commun accord» avec le Premier ministre.
Le «sentiment du devoir accompli» pour Barlen Vyapoory
Aujourd’hui qu’il quitte le Palais du réduit, l’ancien président intérimaire dit partir avec le «sentiment du devoir accompli», pour se consacrer à l’enseignement de l’anglais et au mentoring auprès des jeunes Mauriciens. Ancien vice-président de la République (2016—2018), Barlen Vyapoory avait succédé à Ameenah Gurib-Fakim en mars 2018 à la tête du pays.
Sa devancière avait été contrainte à la démission après la révélation du «Planet Earth Gate», un scandale du nom de cette ONG dont elle avait utilisé une carte de crédit pour des achats personnels. Ce dernier épisode avait sérieusement écorné le prestige attaché à la fonction présidentielle. Alors que le Parlement devrait se réunir le 2 décembre pour désigner le successeur de Barlen Vyapoory, deux figures féminines émergent au milieu des favoris pour réhabiliter la capacité des femmes africaines à occuper de hautes fonctions.
A 67 ans, le nom de Maya Hanoomanjee est fortement cité pour devenir la seconde présidente de l’Ile-Maurice. Pour l’heure, ce n’est qu’une simple supposition mais, même honorifique, cette fonction pourrait couronner sa carrière. Issue du Mouvement socialiste militant (MSM), elle a été ministre de la Santé (2010-2011) dans le cabinet du Premier ministre Navin Ramgoolam ; un poste qu’elle a quitté sous une litanie de scandales. Première femme à occuper le fauteuil de la présidence de l’Assemblée nationale, Maya Hanomanjee a servi sous ce titre sous trois présidents de la République avant de céder le perchoir. Aujourd’hui, même si des analyses insistantes la voient revenir dans les couloirs de l’hémicycle, une nomination au Palais du Réduit serait une consécration. Mais la fonctionnaire à la retraite n’est pas la seule femme en lice pour le fauteuil du Château.
Hanoomanjee ou Labelle pour féminiser les photos de famille des chefs d’Etat
En face, la figure gauchiste Françoise Labelle fait office de véritable outsider. Depuis l’an 2000 au moins, cette diplômée en psychologie arpente les allées du Parlement monocaméral de l’Ile-Maurice. D’abord en tant que député de la circonscription «Beau-Bassin/Petite-Rivière» (2000-2005). Cette militante de la première heure du Mouvement militant mauricien (MMM, mauve) se découvre ensuite un destin à la circonscription «Vacoas et Floreal», la plus grande de l’Ile, où elle a réussi à se faire élire en 2005 puis réélire à toutes les élections depuis lors. L’ancienne présidente du parlement panafricain se verrait bien présidente de la République parlementaire de Maurice. Un poste qui lui permettra de faire avancer les dossiers sur la réforme de l’éducation, un des chevaux de bataille qui lui ont valu sa notoriété.
Plus loin, l’arrivée d’une femme à la tête de l’Ile-Maurice serait un signal fort pour l’image du pays à l’international. Indirectement, ce serait un plaidoyer pour plus de femmes à la tête de pays africains. Dans un Continent où souvent les photos de famille des chefs d’Etat ne laissent voir que des figures masculines, l’arrivée d’une femme à la présidence (honorifique) placerait Maurice en bonne position dans le « wowen empowerment» et permettrait de féminiser les photos de famille des chefs d’Etat du Continent.
En effet outre l’Ethiopienne Sahle-Work Zewde devenue en octobre 2018, la première femme chef d’Etat dans le pays, depuis d’Ellen Johnson Sirleaf au Liberia ou encore Joyce Banda au Malawi, de moins en moins de femmes occupent la fonction présidentielle, qu’elle soit honorifique ou de plein exercice. En Namibie, Esther Muijangue qui se porte candidate pour la présidentielle en cours, rappelle ce déficit de présence des femmes à des postes de responsabilités étatiques. Si la succession d’Ameena Fakim-Gurib est assurée par une autre femme, cela pourrait être le signe que malgré le scandale qui a emporté cette dernière, l’on continue de faire confiance aux compétences féminines sur l’Ile de l’Océan indien. Et Maya Hanoomanjee et Françoise Labelle semblent bien placées pour relever le défi.
Source: La Tribune Afrique/Mis en ligne: Lhi-tshiess Makaya-exaucée