Le ministre de l’Intérieur a qualifié de « criminels » les incendies qui ont tué quelque 70 personnes en Kabylie. Régulièrement, il évoque la thèse d’individus qui voudraient détruire l’Algérie.
Alors que les incendies qui calcinent la Kabylie depuis le lundi 9 août ont tué plusieurs dizaines d’Algériens, le Premier ministre Aymen Benabderrahmane s’est rendu jeudi 12 août à Tizi Ouzou, ville particulièrement touchée, accompagné de son ministre de l’Intérieur, Kamel Beldjoud. « L’Algérie dispose de moyens scientifiques et technologiques démontrant qu’il s’agissait bien d’actes criminels », a-t-il affirmé. Une thèse déjà soutenue par Kamel Beldjoud deux jours plus tôt : « Seules des mains criminelles peuvent être à l’origine du déclenchement simultané d’une cinquantaine d’incendies à travers plusieurs localités de la wilaya ». Déjà début juillet, tandis que des incendies ravageaient la wilaya de Khenchela, le ministre avait affirmé que « des personnes » tentaient « de créer le désordre à travers ces feux de forêts ».
Dans un contexte de colère et de soupçon généralisé, qui a mené au lynchage de Djamel Bensmail, suspecté d’être à l’origine des feux et brûlé vif à Larbaâ Nath Irathen, ces déclarations suscitent la controverse. D’autant que Kamel Beldjoud est un coutumier de la théorie du complot. En mars 2020, il avait par exemple déclaré que certains manifestants du Hirak voulaient nuire à l’Algérie avec le soutien de « parties étrangères [qui] soutiennent des éléments connus aux intentions claires et œuvrent par leur biais à détruire le pays ».
Ancien ministre de Bouteflika
Avant d’être ministre de l’Intérieur, Kamel Beldjoud a occupé plusieurs postes au service de l’État depuis 1982, notamment dans l’administration algérienne. Il a présidé différentes daïras dans plusieurs wilayas avant de devenir wali délégué. En 2016, il entre au ministère de l’Habitat en tant que secrétaire général, avant d’être nommé ministre de l’Habitat par Abdelaziz Bouteflika le 31 mars 2019, alors que ce dernier est fortement contesté pour avoir annoncé qu’il briguait un cinquième mandat.
À son arrivée au pouvoir, en décembre 2019, Abdelmadjid Tebboune décide de limoger le ministre de l’Intérieur en place, Salah Eddine Dahmoune. Ce dernier avait qualifié les opposants au scrutin présidentiel du 12 décembre de « pseudos-Algériens », de « traîtres », de « mercenaires », de « pervers » et d’« homosexuels » qui « véhiculent les idées restantes du colonialisme ». Le président algérien nomme alors Kamel Beldjoud.
Les remaniements successifs ne l’inquièteront pas. Il est toujours aux commandes quand la répression s’intensifie contre la reprise d’un Hirak affaibli par la crise sanitaire et que les arrestations se multiplient. En mai dernier, son ministère avait appelé les manifestants à « déclarer l’heure du début et de la fin de la manifestation, son itinéraire et les slogans à scander auprès des services compétents ». « Le non-respect de ces procédures sera considéré comme une violation de la loi et de la constitution. De ce fait, ces marches seront illégales et elles seront traitées comme telles », avait-il alors mis en garde.
Source: Jeune Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée