La zone de libre-échange entre l’Algérie et l’Union européenne paraît compromise

Une vue générale montre le port et les bâtiments d’Alger au lever du soleil, le 6 décembre 2017. © Ludovic Marin, AFP


L’entrée en vigueur de la zone de libre-échange entre l’Algérie et l’Union européenne, prévue au 1er septembre après quinze ans de préparation, semble compromise tant elle est contestée par les dirigeants politiques, les chefs d’entreprises et des économistes algériens.

Plus d’une décennie de préparation en vain ? La zone de libre-échange (ZLE) entre l’Algérie et l’Union européenne, qui doit entrer en vigueur le 1er septembre, semble compromise, d’autant qu’Alger a demandé à moult reprises au fil des années de renégocier un accord trop défavorable à ses yeux.

S’ajoute à cela la décision du président algérien, Abdelmadjid Tebboune, de confier début août au ministre du Commerce, Kamel Rezig, le soin de « procéder à une évaluation du dossier sur l’accord d’association avec l’Union européenne ». Selon lui, cet accord « doit faire l’objet d’une attention particulière, faisant valoir nos intérêts pour des relations équilibrées ».

Le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, a enfoncé le clou mercredi. S’il n’a pas cité l’accord signé entre l’Algérie et l’UE en avril 2002, l’allusion est transparente. Il a promis « un examen des règles de défense commerciale » à travers la « révision » des accords économiques et commerciaux « préjudiciables au pays », et la réorientation de l’appareil diplomatique au service des intérêts économiques algériens.

La mise en place officielle de la ZLE est la cible de critiques quasi unanimes des dirigeants politiques, des patrons et des économistes algériens qui dénoncent une balance commerciale largement en défaveur de la quatrième économie d’Afrique, il est vrai peu compétitive.

Selon le président de l’Association nationale des exportateurs algériens, Ali Bey Nasri, l’Algérie a importé pour 320 milliards de dollars (plus de 270 milliards d’euros) de biens entre 2005 et 2019 tandis que ses exportations vers l’UE, son premier partenaire commercial, n’ont atteint que 15 milliards de dollars, hors pétrole et gaz, durant la même période.

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Un accord conclu quand l’UE avait quinze membres

L’accord d’association entre Bruxelles et Alger, entré en vigueur au 1er septembre 2005, projetait d’ouvrir leurs marchés respectifs au sein d’une ZLE. Il prévoyait pour cela une période de transition de douze ans, jusqu’en 2017, afin que l’Algérie élimine progressivement ses droits de douane sur des produits industriels et qu’elle applique une libéralisation sélective de ses produits agricoles.

Cette période a par la suite été prolongée de trois ans, jusqu’au 1er septembre 2020, pour certains produits comme l’acier, les textiles, les produits électroniques et l’automobile.

Cet accord « a été mal négocié à la base. À l’époque, l’Algérie l’avait ratifié avec une Europe de quinze membres. Aujourd’hui, ils sont 27 et seront encore plus nombreux dans quelques années », explique Ali Bey Nasri.

« Le partenariat Algérie-UE n’a pas tenu ses promesses pour l’Algérie », abonde Nadji Khaoua, professeur d’économie à l’université d’Annaba (nord-est). Selon lui, la seule ouverture du marché algérien aux produits de consommation étrangers ne saurait bâtir une économie moins rentière – comme l’est celle de l’Algérie, dépendante du pétrole –, ni plus productive, ni par conséquent générer de la croissance.

Il s’agit de passer à un système « valorisant par la production les ressources variées négligées jusqu’à présent. Ce passage exige la promotion de l’intérêt national non soumise aux pressions étrangères », plaide l’économiste.

Un groupe de travail mis en place

Le ministère du Commerce est resté évasif concernant le sort de la zone de libre-échange, précisant à l’AFP qu’un groupe de travail interministériel avait été mis en place ayant notamment pour mandat « l’évaluation de l’accord d’association avec l’Union européenne ».

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Nadji Khaoua, plaidant pour une renégociation des « relations avec l’UE sur une base d’État à État », estime qu' »une pause serait la plus indiquée pour rediscuter des questions de fond qui empêchent un partage équitable des bénéfices économiques éventuels ».

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Même position du côté d’Ali Bey Nasri, qui souhaite également un rééquilibrage des relations avec les Européens. « Ils veulent vendre et nous, nous sommes obligés de compter nos sous. »

« Je suis de ceux qui disent ‘basta !' », poursuit-il, soulignant qu’en réalité « 99 % des produits industriels sont depuis 2018 » dans les conditions requises pour la ZLE.

« Ce que n’accepte pas l’UE, c’est que l’Algérie mette en place des mesures de protection de notre outil de production qui est déjà extrêmement fragilisé », relève-t-il.

Source : France 24 /Mis en ligne :Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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