Au cours de la conférence annuelle de l’organe en charge de la santé de l’Union africaine (CDC Africa), qui s’est ouvert mardi [14.12.21] et dure jusqu’au 16 décembre prochain, les chercheurs et décideurs discuteront des solutions possibles pour réaliser davantage de progrès pour renforcer les systèmes de santé et l’innovation scientifique en Afrique. Et l’une des pistes, est l’instauration dans les pays, l’assurance maladie pour tous.
Dès le début de l’année 2019, les chefs d’État et de gouvernement des pays de l’Union Africaine ont clairement identifié le problème du financement insuffisant de la santé. Le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, soulignait à l’époque les « objectifs ambitieux » pour 2030 : « En finir avec les épidémies et parvenir à des soins de santé complets pour tous ». Près de trois ans plus tard, les écarts sont toujours importants.
L’assurance maladie universelle, telle qu’instaurée il y a deux mois au Togo et actuellement en discussion au Bénin, jouent ici un rôle important. Dans certains autres pays, en revanche, il existe déjà une première expérience avec les assurances-maladies universelles – par exemple au Ghana.
L’assurance maladie ne couvre pas tout
Au Ghana l’assurance maladie a été introduite en 2003 : tous les citoyens peuvent s’inscrire moyennant de faibles cotisations annuelles : les adultes paient actuellement environ 30 cedis ghanéens (soit environ 4,35 euros), les enfants 6 cedis. Avec une carte de santé, ils peuvent accéder aux services de n’importe quel établissement participant au programme gouvernemental.
Mais l’assurance ne couvre pas toujours tous les frais. Betty Yawson vit à Accra. Elle s’est plainte des sommes élevées qu’elle a dû payer pour le traitement de sa petite fille – malgré la carte d’assurance qu’elle avait présentée elle a encore payé 400 cedis ghanéens (environ 58 euros) pour pouvoir traiter sa fille.
« Ce n’était qu’une petite blessure qui a dû être traitée. Nous payons cher pour l’assurance ! Je pense que le service doit être meilleur. » De plus, seuls les médicaments bon marché sont remboursés.
Au Kenya en Afrique de l’Est, le gouvernement a essayé différents modèles avant que finalement le président Uhuru Kenyatta ne fasse de l’assurance universelle une priorité politique en 2017, explique Patricia Odero, directrice régionale du Duke Global Health Institute à Nairobi.
Les pauvres paient eux-mêmes le traitement
L’accent est désormais mis sur l’élargissement des soins : « Notre caisse nationale d’assurance et nos assurances maladie privées couvrent une petite partie de la population, qui est souvent constituée de salariés et des personnes ayant volontairement opté pour une assurance maladie privée », a précisé Patricia Odero.
« Cependant, la majorité de notre population paie elle-même les soins. De nombreuses personnes suivent des traitements, mais ne peuvent pas le payer. Ils n’ont pas d’emploi formel et leurs revenus sont donc irréguliers. Cela rend difficile le développement de produits qui répondent à leurs besoins« , déplore également la chercheuse.
De plus, la pandémie de Covid 19 a eu un fort impact sur l’économie, c’est pourquoi la priorisation de l’assurance maladie prépayée a baissé. Pour y faire face, le gouvernement a annoncé renforcer les soins de santé primaires, et cela est conforme aux propositions de l’Organisation mondiale de la santé.
Le Rwanda – un pionnier de l’assurance
Le Rwanda a longtemps fait figure de pionnier en matière d’assurance maladie. Parmi les plus grandes réalisations du système rwandais, citons l’assurance maladie communautaire « Mutuelles de Santé », dont bénéficient 88% de la population.
Un grand pas en avant, pense Jean-Olivier Schmidt – il est expert en santé à la Société allemande pour la coopération internationale (GIZ).
Au Rwanda, les autorités font du respect des règles d’hygiène leur priorité face à la Covid-19.
Depuis une vingtaine d’années, le gouvernement rwandais fait d’énormes efforts pour mettre en place une assurance maladie pour les pauvres, une assurance pour tous. La GIZ apporte son soutien à ce programme.
« Jusqu’à il y a quelques années, les Rwandais devaient payer les visites chez le médecin de leur poche. Afin de pouvoir se permettre des interventions coûteuses, comme une césarienne, un accouchement d’urgence. Les habitants des campagnes, par exemple les familles d’agriculteurs, ont dû vendre leurs bétails. Parce qu’il n’y avait pas d’assurance maladie comme celle que nous connaissons en Allemagne depuis 130 ans ».
Cotisations fixées selon les revenus
Le système actuel ressemble à ceci : « Chaque citoyen verse une cotisation régulière dans une cagnotte de santé qui est administrée par la communauté. Après la visite chez le médecin ou à l’hôpital, les postes de santé facturent les prestations aux assurances communautaires et non, comme auparavant, par paiement direct. »
A cette époque, il n’y avait pas de personnel qualifié pour ce travail dans les communes, comme il y en avait en Allemagne pour les travailleurs de la sécurité sociale.
La GIZ a formé à des postes de trésorerie au Rwanda pour cette fonction. Les cotisations sont payées par tous les citoyens, mais échelonnées en fonction de la richesse. Pour les plus pauvres, c’est l’Etat qui paye.
Source: Deutsche Welle Afrique/ Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée