Lilian Gasper est interne en médecine dans le service de cancérologie du centre médical de Moshi en Tanzanie. Elle reçoit de plus en plus de personnes en consultation mais souvent, ses patients ne savent pas grand-chose sur le cancer :
« Il y a aussi le manque d’éducation au dépistage. Les gens ne sont pas soumis à un dépistage régulier du cancer du col de l’utérus par exemple. Ce qui fait que les patientes ne viennent à l’hôpital que si elles présentent des symptômes, autrement dit lorsqu’elles ont déjà une charge de morbidité élevée. »
La médecin se rend dans les villages pour faire de la sensibilisation. Avec son équipe, elle montre par exemple aux femmes comment palper leurs seins. Elle vaccine aussi les jeunes filles contre le cancer du col de l’utérus.
Mais l’augmentation du nombre de cancers en Afrique subsaharienne n’est pas seulement liée au manque de connaissances de la population, explique Lilian Gasper :
« L’augmentation du nombre de cas est également due aux comportements à risque tels que les partenaires sexuels multiples et les pratiques dangereuses. Mais aussi le manque de vaccin : en comparaison aux pays développés, beaucoup de femmes ne sont pas vaccinées. »
Des formes de cancer plus agressives
Selon le docteur Oliver Henke, qui a également travaillé en Tanzanie, environ 30% de la totalité des cancers en Afrique subsaharienne sont causés, directement ou indirectement, par des infections liées notamment à des comportements à risque :
« Un exemple classique est le sarcome de Kaposi qui survient en cas d’infection par le VIH. Ou encore le taux élevé de cancer du col de l’utérus qui est provoqué par le papillomavirus humain. Et c’est déjà une différence avec les entités cancéreuses que nous voyons ici en Allemagne ou en Europe, où nous avons plutôt affaire à des cancers du côlon et du poumon ».
Le docteur Henke a aussi observé que les formes de cancers développés en Afrique sont souvent plus agressives qu’en Europe – une différence d’origine probablement génétique et qui expliquerait pourquoi le taux de mortalité dû à la maladie est aussi plus élevé.
Manque de médecins, manque de moyens
Enfin, le manque d’oncologues sur le continent est flagrant : en Tanzanie par exemple, pour 60 millions d’habitants, il y a moins de vingt médecins spécialisés dans le cancer. Et seuls trois hôpitaux proposent des thérapies adaptées … une thérapie qu’il faut par ailleurs pouvoir financer. Rare sont les gens qui disposent d’une assurance santé qui couvre les frais engendrés par la maladie.
À noter que la vie en ville, l’exposition à différentes formes de pollution, une consommation accrue d’alcool et de tabac mais aussi une nourriture trop chargée en viande, en sucre et en aliments transformés sont autant de facteurs qui augmentent le risque de contracter la maladie, selon une étude scientifique publiée en 2018.
Source: Deutsche Welle Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée