Les dirigeants rivaux du Soudan du Sud se sont engagés, dimanche 3 avril, sur une disposition militaire clé du fragile accord de paix de 2018, après une médiation du Soudan voisin à Juba, a constaté un journaliste de l’AFP. Le président Salva Kiir et le vice-président Riek Machar ont accepté de former un commandement unifié des forces armées, l’une des nombreuses questions non résolues qui bloquent la mise en œuvre du pacte de 2018 visant à mettre fin à cinq années de guerre civile meurtrière.
« La paix est une question de sécurité et aujourd’hui nous avons [atteint] une étape importante », a déclaré Martin Abucha, qui a signé l’accord au nom du parti d’opposition de M. Machar, le SPLM/A-IO. Le ministre des affaires présidentielles, Barnaba Marial Benjamin, a salué l’accord comme une « étape nécessaire […] qui ouvre la voie à un gouvernement stable de la République du Soudan du Sud ». « Il s’agit d’informer tout le monde que nous sommes pour la paix et que nous devons tous travailler pour la paix », a ajouté Tut Gatluak, un conseiller sécurité du président Kiir.
Les deux hommes forts du pays étaient présents dimanche lors de la cérémonie de signature de l’accord dans la capitale, qui prévoit une répartition – 60 % pour le camp du président et 40 % pour celui de Machar – des postes de direction dans l’armée, la police et les forces de sécurité nationales.
Mohamed Hamdan Daglo, actuellement numéro deux du conseil soudanais au pouvoir après le coup d’Etat du 25 octobre à Khartoum, était arrivé à Juba vendredi pour tenter de trouver des solutions dans le cadre des dispositions sécuritaires issues de l’accord de paix. Cette médiation a permis de dégager un consensus, alors que M. Kiir avait publié le 25 mars un décret présidentiel sur la formation de la structure de commandement, rapidement rejeté par M. Machar, qui dénonçait une initiative « unilatérale ».
Un pays en proie au chaos
Les tensions entre les forces loyales à Salva Kiir et l’ancien chef rebelle Riek Machar avaient connu une nouvelle escalade récemment, faisant craindre à la communauté internationale un retour à un conflit de grande ampleur dans la plus jeune nation du monde. Fin mars, le SPLM/A-IO s’était retiré de l’instance chargée de contrôler l’application de l’accord de paix, accusant l’armée et les forces loyales au chef de l’Etat de mener régulièrement des attaques contre ses bases.
Depuis son indépendance du Soudan en 2011, le pays est en proie à des violences à caractère politico-ethnique et à une instabilité chronique qui l’empêchent de se remettre de la sanglante guerre civile qui a fait près de 400 000 morts et 4 millions de déplacés entre 2013 et 2018. L’accord de paix de 2018 prévoit le principe d’un partage du pouvoir au sein d’un gouvernement d’union nationale, formé en février 2020 avec Kiir au poste de président et Machar comme vice-président. Mais il est resté largement inappliqué et leur rivalité persiste, laissant le pays en proie au chaos.
Selon un rapport conjoint de la mission de l’ONU dans le pays (Minuss) et du Bureau des droits de l’homme de l’ONU publié début mars, au moins 440 civils ont été tués entre juin et septembre 2021 dans la région de Tambura (sud-ouest) lors de combats entre factions pro-Machar et l’armée loyale à Salva Kiir. Plus de 2 millions de Sud-Soudanais ont fui le pays dans ce qui constitue « la plus grande crise de réfugiés en Afrique », selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
Source: Le Monde Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée