L’Éthiopie décrète l’état d’urgence dans le Tigré après une attaque contre l’armée

Des soldats éthiopiens en patrouille

Le gouvernement fédéral éthiopien a placé mercredi le Tigré en état d’urgence, après une attaque contre une base militaire fédérale dans la nuit. Addis Abeba accuse le gouvernement de cet État fédéré du nord du pays d’avoir perpétré l’attaque, et a annoncé une riposte.

L’Éthiopie face à un nouveau conflit interne ? Le gouvernement fédéral a décrété, mercredi 4 novembre, l’état d’urgence dans l’État du Tigré, après une attaque contre « une base militaire fédérale » dans la nuit de mardi à mercredi. Le Premier ministre Abiy Ahmed accuse le gouvernement local, dirigé par le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), d’être derrière cette attaque qui intervient après des semaines de conflit larvé

Le gouvernement fédéral a annoncé le lancement d’une opération militaire contre cette région du nord du pays.

« Le TPLF a attaqué un camp militaire [fédéral] dans le Tigré », a déclaré Abiy Ahmed dans un texte posté sur Facebook et sur Twitter vers 2 h, heure locale [23 h GMT]. « Nos forces de défense ont reçu l’ordre […] d’assumer leur tâche de sauver la nation. Le dernier stade de la ligne rouge a été franchi [et] le gouvernement fédéral est donc contraint à la confrontation militaire », a-t-il ajouté.

Selon Redwan Hussein, porte-parole de la cellule de crise mise sur pied par le gouvernement, « l’objectif militaire est, premièrement, de maintenir la loi et l’ordre, ensuite de libérer le peuple tigréen ».

Le gouvernement veillera à « impliquer les populations du Tigré dans leur propre libération, à ne pas être des victimes et servir de bouclier au […] petit gang du TPLF [qui] ne représente pas [la totalité des habitants] », a-t-il ajouté.

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Une telle réponse militaire pourrait marquer le début d’un potentiel conflit interne dans le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique, en proie à des tensions internes croissantes.

« De nombreux morts » dans l’attaque, selon Addis Abeba

Le Tigré, situé près de la frontière avec l’Érythrée, a organisé en septembre des élections régionales malgré le désaccord du gouvernement fédéral, qui a jugé ce scrutin illégal. 

Abiy Ahmed a déclaré dans la nuit sur la télévision d’État que « des forces déloyales » s’étaient retournées contre l’armée à Mekele, la capitale du Tigré, et à Dansha, une ville de l’ouest de la région. L’assaut à Dansha a été « repoussé » par des forces de sécurité de la région Amhara, qui borde le sud du Tigré, a-t-il ajouté.

L’attaque a fait « de nombreux morts, des blessés et des dégâts matériels », a dit le Premier ministre dans son intervention télévisée.

Le gouvernement local a de son côté affirmé que le commandement nord de l’armée fédérale avait fait défection en sa faveur, ce que le bureau du Premier ministre a démenti.

Netblocks, un site qui surveille les coupures Internet, a indiqué que ce réseau semblait avoir été coupé dans la région à partir de 1 h (heure locale). De même, la nature concrète de la réponse militaire fédérale n’était pas clairement établie dans l’immédiat.

Des élections régionales illégales, selon Addis Abeba

Avec la montée des tensions, le Tigré ne reconnaît plus l’autorité de l’État fédéral depuis que les élections nationales qui devaient se tenir en août dernier ont été reportées.

Rejetant la prolongation par le Parlement fédéral du mandat des députés – nationaux et régionaux – censé expirer en octobre, les leaders tigréens ont décidé de tenir unilatéralement des élections dans leur région en septembre.

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Depuis, chaque camp considère l’autre comme illégitime. Les sénateurs éthiopiens ont voté début octobre pour une rupture des contacts et des financements entre les autorités fédérales et les responsables du Tigré.

Les responsables originaires du Tigré ont dominé la politique nationale pendant près de 30 ans avant l’arrivée au pouvoir d’Abiy Ahmed en 2018, qui les a mis à l’écart pour la première fois depuis la chute du dictateur Mengistu Haile Mariam en 1991.

« La moitié des forces armées » concentrées dans la région

La semaine dernière, ces tensions se sont cristallisées sur le contrôle des personnels et équipements militaires du Tigré. Car cet État abrite une part importante des personnels et équipements militaires de l’État fédéral, un héritage de la guerre qui avait opposé en 1998-2000 l’Éthiopie à l’Érythrée, qui borde cette région septentrionale.

La région totalise « plus de la moitié de l’ensemble du personnel des forces armées et des divisions mécanisées » du pays, selon un rapport du centre de réflexion International Crisis Group (ICG) publié vendredi.

La population du Tigré représente 5 % des quelque 109 millions d’habitants éthiopiens mais la région est plus riche et plus influente que les huit autres régions du pays.

Des officiels tigréens ont toutefois déclaré récemment qu’ils ne déclencheraient pas un conflit militaire. « Nous ne serons jamais les premiers à tirer, ni les premiers à flancher », a déclaré la semaine dernière à l’AFP Getachew Reda, un haut responsable du TPLF.

Mardi soir, quelques heures avant l’annonce du Premier ministre, Wondimu Asamnew, un autre haut responsable tigréen, a déclaré à l’AFP que le gouvernement fédéral était en train d’amasser des troupes à la frontière sud du Tigré  une information qui ne pouvait pas être vérifiée de manière indépendante.

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Source : France 24/Mis en ligne :Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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