D’autres personnalités, dont deux ex-ministres de l’industrie, ont été condamnées pour « corruption » ou « népotisme » dans des scandales politico-économiques.
La cour d’appel d’Alger a condamné deux ex-premiers ministres de l’ère Bouteflika, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, respectivement à quinze et douze ans de prison ferme, à l’issue d’un procès sans précédent pour corruption, a-t-on appris de source judiciaire.
En revanche, elle a allégé des peines infligées à l’encontre d’anciens ministres et patrons algériens, impliqués dans un scandale automobile et accusés de financement illégal de la dernière campagne électorale du président déchu Abdelaziz Bouteflika, selon des avocats de la défense. La cour d’appel a confirmé, mercredi 25 mars, les sentences prononcées le 10 décembre 2019 contre Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, tous deux proches de M. Bouteflika.
« Ce verdict en appel reste une décision politique », a déclaré à l’AFP Me Mourad Khader, l’avocat de M. Sellal. Les deux condamnés ont huit jours pour se pourvoir en cassation.
Deux anciens ministres de l’industrie, Mahdjoub Bedda et Youcef Yousfi, condamnés en première instance à dix ans de prison, ont vu, eux, leurs peines réduites de moitié.
Un autre inculpé influent, Ali Haddad, ex-président de la principale organisation patronale algérienne FCE et PDG du numéro un privé du BTP, considéré comme l’un des principaux financiers des dernières campagnes électorales de M. Bouteflika, a été condamné à quatre ans de prison contre sept ans en première instance. Mais, pour son avocat, Me Kaled Bourayou, « c’est un verdict injustifiable ». « Tant que la justice est instrumentalisée, on ne peut pas s’attendre à autre chose », a critiqué l’avocat qui va se pourvoir en cassation.
Luttes de clans au sommet
Le président Abdelaziz Bouteflika a été poussé à la démission le 2 avril 2019, sous la pression d’un mouvement de contestation antirégime inédit à la suite de l’annonce de sa candidature à un cinquième mandat.
Le financement de sa campagne « a occasionné une perte au Trésor public estimée à 110 milliards de dinars » (plus de 830 millions d’euros), selon le procureur.
Deux autres riches hommes d’affaires, Hassen Arbaoui et l’ancien vice-président du FCE Mohamed Bairi, propriétaires d’usines de montage de véhicules, ont été respectivement été condamnés, mercredi, à quatre et trois ans d’emprisonnement.
Depuis le 1er mars, une vingtaine de personnalités − d’anciens responsables politiques, de puissants patrons et des hauts fonctionnaires − étaient jugées en appel.
Elles étaient poursuivies pour le financement « occulte » de la cinquième campagne électorale de M. Bouteflika, début 2019, ainsi que pour « népotisme » et « favoritisme » dans l’industrie automobile via des partenariats entre marques étrangères et grands groupes algériens, souvent propriétés d’hommes d’affaires liés à l’entourage de l’ex-président. Les groupes agréés par les autorités avaient bénéficié d’importantes subventions et de substantiels avantages fiscaux, malgré un cahier des charges rarement respecté.
Le scandale automobile a entraîné une perte pour le Trésor public estimée à plus de 128 milliards de dinars (975 millions d’euros), selon des chiffres officiels.
D’autres procès attendent certains des accusés, cités dans des volets des vastes enquêtes relatives à des faits présumés de corruption, ouvertes depuis le départ du président Bouteflika et soupçonnées de servir opportunément des luttes de clans au sommet dans l’après-Bouteflika.
Source: Le Monde Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée