L’investiture du président ivoirien Alassane Ouattara pour un troisième mandat a lieu alors que ses principaux opposants sont emprisonnés ou en exil.
Selon l’hebdomadaire ivoirien Ivoir’Hebdo, 396 personnes proches de l’opposition sont actuellement incarcérées et plusieurs milliers de personnes auraient quitté le pays.
« On part à cette investiture dans un contexte de régression démocratique. Et c’est bien dommage », regrette le journaliste et analyste André Sylver Konan. Pour lui, ces chiffres illustrent l’affaiblissement de la démocratie ivoirienne.
Cette investiture, qui devrait être une fête de la démocratie pour tous les Ivoiriens, s’annonce donc plutôt comme un sujet de tension.
Les populations proches de l’opposition ne se sentent pas concernées par cette prestation de serment.
« Pour moi l’investiture d’Alassane Dramane Ouattara est un non événement », estime ainsi Marie Noëlle Houlé, membre du bureau politique du PDCI.
« Nous ne nous reconnaissons pas dans cette forfaiture. Actuellement, nous sommes dans une situation de ni paix ni guerre. Malheureusement, nous continuons de comptabiliser le nombre d’enlèvements de jeunes proches de l’opposition. »
HRW dénonce des arrestations politiques
Les arrestations de partisans de l’opposition sont restées jusqu’à ce jour sans suite judiciaire. L’opposition dénonce des procédures politiques et une justice aux ordres.
Jim Womington de Human Rights Watch soutient pour sa part que les arrestations des leaders du FPI et du PDCI visent à museler l’opposition.
« Par rapport à l’arrestation des membres de l’opposition dont Pascal Affi N’Guessan, qui n’est pas équitable, cela fait craindre que les enquêtes et les poursuites qui continuent soient plutôt motivées par des raisons politiques et pas par des raisons de justice. »
Mais pour Joël N’Guessan du RHDP, le parti au pouvoir, ces arrestations répondent au besoin de rompre avec l’impunité en Côte d’Ivoire.
« Tout récemment, ceux qui se sont rendus coupables d’actes de violences, obéissant au mot d’ordre lancé par monsieur Bédié et monsieur Affi N’Guessan, ont occasionné des pertes en vies humaines et des dégâts matériels. Donc il est tout à fait normal que ces gens soient détenus en prison et jugés. On ne peut pas continuer sous nos cieux à faire le lit de l’impunité. »
L’investiture d’Alassane Ouattara est prévue à dix heures à Abidjan, en présence de plusieurs chefs d’Etats dont ceux du Togo, du Ghana, du Sénégal, de la Guinée, du Rwanda et de la Mauritanie.
L’élection présidentielle en Côte d’Ivoire a a fait de nombreuses victimes, même si le bilan reste très éloigné de la grave crise post-électorale de 2011.
L’enjeu pour Alassane Ouattara est désormais de rassembler les Ivoiriens autour de lui pour ce troisième mandat controversé.
Source: Deutsche Welle Afrique/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée