Paul Rusesabagina, qui inspira le film « Hôtel Rwanda », refuse de comparaître à son procès

Paul Rusessabagina, lors de l’ouverture de son procès à Kigali, le 17 février 2021. © REUTERS/Clement Uwiringiyimana

Estimant que son droit à se défendre était bafoué, Paul Rusesabagina, le héros du film « Hôtel Rwanda », n’a pas comparu mercredi à son procès. Il est jugé depuis mi-février à Kigali pour « terrorisme ».

Paul Rusesabagina, héros du film « Hôtel Rwanda » n’a pas comparu mercredi 24 mars à son procès. Jugé depuis mi-février à Kigali pour « terrorisme », il a informé les autorités pénitentiaires qu’il n’assisterait plus aux audiences, estimant que son droit à se défendre était bafoué. 

Ex-directeur de l’hôtel des Mille Collines à Kigali, Paul Rusesabagina, 66 ans, a été rendu célèbre par un film de 2004 racontant comment il avait, dix ans plus tôt, sauvé plus de 1 000 personnes durant le génocide des tutsi. Ce hutu modéré est ensuite devenu un critique du régime du président rwandais, Paul Kagame. 

« Un enlèvement »

Vivant en exil depuis 1996 aux États-Unis et en Belgique, il a été arrêté fin août au Rwanda dans des circonstances troubles, à la descente d’un avion qu’il pensait à destination du Burundi. Lui et ses avocats dénoncent « un enlèvement ». 

Dans une interview à Al-Jazeera fin février, le ministre rwandais de la Justice avait indiqué que le gouvernement avait financé l’opération. 

Paul Rusesabagina est visé par neuf chefs d’accusation, dont celui de terrorisme. Il est notamment poursuivi pour avoir soutenu le Front de libération nationale (FLN), un groupe rebelle accusé d’attaques meurtrières ces dernières années au Rwanda. 

Dans une lettre lue mercredi à l’audience, le directeur de la prison où il est incarcéré a informé le tribunal que Paul Rusesabagina avait indiqué « qu’il ne comparaîtrait plus jamais devant ce tribunal, pas seulement aujourd’hui mais même pour de futures audiences. Il a dit ne pas attendre la justice de ce tribunal ». 

A LIRE AUSSI:   Algérie : des porteurs de drapeaux berbères écopent de 6 mois de prison ferme

« Négation du génocide » 

Paul Rusesabagina avait annoncé le 12 mars son intention de boycotter les audiences, jugeant ses droits « violés » après le rejet de sa demande de reporter son procès d’au moins six mois afin de préparer sa défense. 

« Rusesabagina a choisi de ne pas assister à cette audience. Il a le droit de le faire, mais le fait de ne pas comparaître n’empêche pas le procès de se poursuivre », a déclaré Antoine Muhima, un des trois juges. 

Sa famille affirme qu’il n’a pas eu accès aux plus de 5 000 pages de son dossier.  

Il est jugé avec 20 autres accusés, « qui ont tous plaidé coupable et l’ont incriminé », souligne la porte-parole de la Fondation Hotel Rwanda, Kitty Kurth, en déplorant aussi que « le président Kagame a déclaré publiquement que Paul était coupable, annulant de fait son droit à la présomption d’innocence ». 

L’un des témoins-clés de l’accusation, Michelle Martin, une Américaine ayant travaillé avec la Fondation Rusesabagina il y a une décennie, a déposé mercredi durant trois heures. 

Elle a affirmé avoir eu connaissance de courriers électroniques « sur le financement d’activités rebelles » et a accusé Paul Rusesabagina de « négation du génocide ». Elle a affirmé que dès qu’elle avait découvert que celui-ci « était impliqué dans des activités semblant illégales », elle « avait tout remis aux forces de l’ordre américaines ». 

Accusé par une « espion payée par le gouvernement »

Elle a révélé avoir été une informatrice dans une enquête de 2012 contre Paul Rusesabagina aux États-Unis, mais aussi qu’elle avait travaillé pour le compte de Kigali, ce qui l’avait contraint à se déclarer comme « agent étranger » auprès des autorités américaines. 

Ses contrats, disponibles sur le site du ministère américain de la Justice, montrent qu’elle a été payée par le gouvernement rwandais, pour des recherches sur « la diaspora (rwandaise) issue du conflit » post-génocide. 

A LIRE AUSSI:   Commerce intra-africain : hausse des échanges entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso

Kitty Kurth a accusé Michelle Martin d’avoir dans le passé, « en tant qu’espion payée par le gouvernement du Rwanda », poussé Paul Rusesabagina à se rapprocher d’un groupe rebelle hutu rwandais, les FDLR. 

Paul Rusesabagina a admis avoir participé à la création du FLN, considéré comme le bras armé du Mouvement rwandais pour le changement démocratique (MRCD) qu’il a fondé en 2017. Mais il a nié toute implication dans leurs attaques. 

Source: France 24/ Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

Read Previous

Le Botswana dit qu’une enquête préliminaire exclut les infections bactériennes dans les derniers décès d’éléphants

Read Next

Niger : Eviter de nouveaux massacres pour ne pas sombrer dans le chaos