Cela fait exactement une semaine que Thierry Taeymans, directeur général de Rawbank, est incarcéré à la prison centrale de Makala, car soupçonné de complicité de détournements de fonds dans le cadre du programme de 100 jours du président Félix Tshisékédi. Au sein du secteur, l’arrestation du patron de la première banque de la RDC fait mouche.
Personne n’ose le dire tout haut, mais en République démocratique du Congo (RDC), l’incarcération vendredi dernier du directeur général de Rawbank fait bruisser les milieux financiers. « La détention aurait été compréhensible si elle intervenait en bout de chaîne de processus et non en début de chaîne. Ils [la justice, NDLR] auraient dû procéder à des enquêtes de fond pour aboutir à des éléments tangibles pour que l’incarcération soit soutenue », estime un ex-patron de banque.
Thierry Taeymans a été incarcéré vendredi 13 mars au bout de deux jours d’auditions dans le cadre d’investigations sur des transactions de fonds [35 millions de dollars selon la presse locale] en rapport avec le magnat libanais Jammal Samih.
Tout a commencé début février, lorsque le président Félix Tshisékédi réclame des investigations autour de son programme de 100 jours lancé en mars 2019, en raison de la non réalisation de plusieurs projets dont le chantier des « sauts-de-moutons » à Kinshasa. Sur le volet habitat d’un coût total de 57,6 millions de dollars, Samibo Congo, société de Jammal Samih avait remporté l’appel d’offres pour la construction de 1 500 logements dans cinq villes du pays. Mais alors que le projet n’a pas été réalisé, Samibo Congo aurait encaissé une enveloppe y afférant via Rawbank, alors que le compte « officiellement » transmis par l’entreprise était domicilié chez une autre banque.
Auditionné la semaine dernière, sans pouvoir justifier de l’utilisation de 17 millions de dollars, Jammal Samih a été placé en détention. Alors que plusieurs têtes sont ainsi récemment tombées dont celle de David Blattner, patron de la société de BTP Safricas, l’incarcération de Thierry Taeymans est probablement venue donner une autre dimension à cette affaire. Et pour cause, Rawbank est la première banque du pays. « En réalité, le point de départ n’était pas la gouvernance de tous ces projets, mais plutôt les énormes embouteillages causés par la non-avancée des travaux. C’était devenu infernal à Kinshasa …», explique une source dans le secteur bancaire qui requiert l’anonymat.
« Qu’il clarifie ce qui doit l’être »
Mais connaissant la puissance d’influence de la banque, pour en avoir dirigé une, l’ex-patron de banque estime que Thierry Taeymans devrait pouvoir collaborer en toute transparence avec les autorités et « dire tout ce qu’il sait pour sortir la tête haute de cette affaire ». D’autant que dans une mise au point disponible sur son site web, Rawbank assure qu’elle « continuera de collaborer avec la Justice congolaise, étant convaincue que la vérité finira par être établie », tout en regrettant l’incarcération de son CEO.
« La méthode n’était pas bonne, mais qu’il [Thierry Taeymans, NDLR] clarifie ce qui doit l’être », conclut l’ex-patron banquier.
Source : La Tribune Afrique /Mis en ligne :Lhi-tshiess Makaya-exaucée