A Soudan, l’équipe de 18 ministres chargée de conduire la transition politique dans le pays a annoncé un programme d’urgence économique pour redresser le pays. Avec à sa tête l’économiste Abdallah Hamdok, le nouveau gouvernement se donne 200 jours pour régler les urgences sociales et économiques au Soudan. Pari ambitieux pour appuyer sa volonté ou simple effet d’annonce ?
Pour un gouvernement qui voulait mettre au second plan les affaires politiques, le moment de l’annonce est tout trouvé. Ce dimanche 8 septembre, Ibrahim Elbadawi, ministre soudanais des Finances, a profité de la cérémonie de prestation de serment du nouveau gouvernement pour présenter le volet économique des actions de l’équipe d’Abdallah Hamdok, le Premier ministre de transition.
Cinq domaines de priorités sur 200 jours
«Une de nos priorités est de mettre en œuvre un programme économique de 200 jours, couvrant cinq domaines», a annoncé le ministre soudanais des Finances. L’objectif annoncé est de tourner l’économie soudanaise vers l’industrialisation, ainsi que «la restructuration du budget, la stabilisation des prix, la réduction du coût de la vie, et la résolution des problèmes de la jeunesse et la réduction de la dépendance à l’aide humanitaire», détaille Ibrahim Elbadawi lorsqu’il annonce ce programme d’urgence.
Pour le contexte, ce dimanche 8 septembre, le gouvernement de transition, mis en place après de longs pourparlers entre le Conseil militaire de transition et les civils, a prêté serment devant Abdel Fattah Al Burhane, devenu le président d’un Conseil souverain qui concrétise le partage du pouvoir entre les hommes en tenue et les civils. Composé de 18 ministres répartis selon les groupes représentés, il est chargé de conduire le pays vers la démocratisation de son régime après la destitution d’Omar El Béchir suite à un vaste mouvement de contestation de la rue.
Les défis du nouveau gouvernement sont énormes. Il doit d’abord surmonter l’hétérogénéité des intérêts entre les groupes qui le composent. Ce sera son premier test de viabilité, puisqu’il devra concilier entre la volonté d’accroître sa crédibilité et la présentation de résultats pour des manifestants attentistes. C’est peut-être pour conjurer une possible paralysie du gouvernement que le Conseil souverain a fait le choix d’un Premier ministre issu du monde de l’économie.
Faire oublier le marasme économique du règne d’Omar El Bechir
Sur ce point précis, l’équipe d’Abdallah Hamdok a fort à faire pour faire oublier le marasme économique de la fin de règne d’Omar El Béchir. Ce dernier avait laissé des indicateurs économiques dans le rouge. Couplés à la dévaluation de la livre soudanaise, la privatisation dans le secteur des importations et le retrait des subventions d’Etat avaient amorcé une inflation qui avait dépassé la barre des 60%, provoquant des émeutes du pain, prélude au vaste mouvement de contestation qui a balayé Omar El Béchir.
D’un autre côté, le Soudan avait fini par devenir dépendant des aides et subventions extérieures sous l’effet de sa lourde dette (plus de 160% du PIB en 2018) et la réduction des investissements refroidis par un secteur bancaire défaillant. Le retour à l’équilibre budgétaire n’en sera pas la panacée. Il faut espérer que le programme d’urgence annoncé par le nouveau gouvernement soit un signal pour regagner la confiance des bailleurs extérieurs et faire reparaître le pays sur les radars économiques internationaux.
La tâche semble immense, mais le gouvernement Hamdok semble cultiver sa volonté de régler les urgences. Reste à souhaiter que ce ne soit pas qu’un effet d’annonce, car il en faut plus pour faire oublier le règne presque trentenaire d’Omar El Béchir.
Source: La Tribune Afrique/Mis en ligne: Lhi-tshiess Makaya-exaucée