Les Algériens, qui continuent de manifester malgré l’annonce d’une prochaine élection présidentielle, scrutent avec attention la transition démocratique en cours chez leur voisin, non sans une pointe d’admiration.
« J’espère que Bouteflika vivra assez longtemps pour qu’on le juge et qu’il aille en prison. Pas comme Ben Ali, qui meurt sans avoir purgé sa peine pour avoir humilié le peuple ! » Ahmed fait partie des quelque 1,3 million d’Algériens qui se sont rendus en Tunisie depuis le début de l’année. Comme chaque été, ce cadre des télécommunications de 46 ans part d’Alger en voiture avec sa femme et ses deux enfants pour rejoindre la frontière tunisienne, puis Hammamet, où il loue un appartement près de la mer pour les vacances. Alors il affirme « suivre de très près » l’actualité tunisienne : la mort de l’ex-président renversé en 2011 et l’élection présidentielle, dont le deuxième tour doit se tenir entre le 29 septembre et le 13 octobre.
« Quand Zbidi [candidat au premier tour] a fait campagne en posant à côté de généraux de l’armée tunisienne, j’ai tremblé ! » se souvient-il en plaisantant. « Mais je peux vous dire que c’est très mal passé dans les médias. Chez nous, ce n’est pas pareil. On se sent quand même plus proches des militaires, même si on voudrait que Gaïd Salah s’en aille… »
La Tunisie, ce bel exemple…
Sous la pression du chef d’état-major de l’armée algérienne, considéré aujourd’hui comme l’homme fort du pouvoir, Abdelkader Bensalah, le président par intérim, a annoncé que la présidentielle se tiendrait le 12 décembre, malgré une opposition encore forte de la rue. « Quand je regarde l’élection en Tunisie, j’ai le blues ! » confie la journaliste Daikha Dridi. « En tant que journaliste, je rêve un jour de couvrir une élection en Algérie complètement ouverte, libre comme celle qui a lieu en Tunisie en ce moment. C’est un rêve qui risque de se réaliser bientôt, les Algériens sont déterminés à faire aboutir leur désir de démocratie. »
L’écrivain Mustapha Benfodil, dont le dernier roman, Body Writing. Vie et mort de Karim Fatimi, écrivain (1968-2014), a été publié en Francesous le titre Alger, journal intense, estime qu’il est « difficile de comparer la transition démocratique en Tunisie et la dynamique du hirak en Algérie ».
« La société tunisienne à réussi à faire un travail de fond dans le sens du changement démocratique en démontant patiemment l’ancien régime, tandis que, chez nous, la structure du pouvoir est restée sensiblement la même », analyse-t-il. Selon lui, si Bouteflika a été destitué et son clan décapité, le système de gouvernance « n’a pas changé d’un iota », avec « une emprise totale de l’institution militaire sur l’appareil d’État ».
Source: Le Point Afrique/Mis en ligne: Lhi-tshiess Makaya-exaucée